19 Sep Motion CNU19 sur les conditions de travail dans l’ESR
Motion de l’AG de la section 19 du CNU sur les conditions de travail dans l’ESR
La section « sociologie-démographie » du Conseil National des Universités, réunie les 4 et 5 septembre 2023, clôture la dernière session RIPEC de l’actuel mandat en prenant connaissance d’une nouvelle attaque du service public d’enseignement et de recherche. Après la loi de programmation de la recherche portée par Frédérique Vidal, le rapport Gillet, remis le 15juin 2023 à notre ministre de tutelle, madame Sylvie Retailleau, compte poursuivre le mouvement de sape de l’ESR public etsuscite de très vives inquiétudes.
Intitulé Mission sur l’écosystème de la recherche et de l’innovation, ce rapport dissocie totalement la structuration scientifique et pédagogique de l’université, réduisant l’enseignement à une punition adressée aux chercheur.es « ne faisant plus de recherche par choix ou circonstances professionnelles » à travers une « application réelle de la modulation de service » (p. 72).
Il individualise les conditions d’exercice et intensifie les concurrences entre enseignant.es-chercheur.es, en étendant l’esprit du dispositif des Chaires de Professeur Junior et en jugeant a posteriori de la qualité des recrutements – financement individuel sur 3 ans de 50 à 300 k€ avec sanction financière de l’université si les « critères de qualité ne sont pas au rendez-vous(publications, succès à des appels à projets …) » (p.73). Pas un mot en revanche de la précarité et des précaires contraint.es à accumuler les charges de TD en l’absence de créations de postes, de la nécessité de revaloriser le montant des taux horaires des vacations d’enseignement, d’appliquer enfin strictement la mensualisation de leur versement, de limiter le recours aux heures complémentaires de la part des collègues titulaires, d’en finir avec les dérogations liées à leur cumul au-delà des règlements des établissements.
Il casse un peu plus les régulations collégiales et les corps intermédiaires indépendants du service public d’enseignement et de recherche, en concentrant le gouvernement de la recherche entre les mains d’un duo – le Haut conseiller à la science nommé (p. 32) et le Président de la République ou la Première Ministre – éloigné des réalités, mais censé conduire, avec plus« d’agilité que les instances collégiales », les programmes scientifiques de demain. A aucun moment du rapport, les instances démocratiques de l’évaluation scientifique par des pairs élus et nommés, telles que le CNU ou encore le Comité national de la recherche scientifique, ne sont seulement évoquées, comme si elles ne faisaient pas partie de « l’écosystème » de l’ESR.
Il étend et renforce, enfin, le financement par projets et la concentration des financements entre les mains de quelques grandes agences de moyen (dont l’ANR).
Dévalorisation totale de la mission d’enseignement, fragilisation des fertilisations croisées enseignement-recherche,intensification de la précarisation des personnels, creusement des inégalités entre enseignant.es-chercheur.es, recherche pilotée d’en haut au rythme de l’agenda politique : la mise en œuvre du rapport Gillet, envisagée par son auteur d’ici un an,est un autre clou enfoncé dans le cercueil du service public d’enseignement et de recherche et transpose les dynamiques responsables de la déstructuration du service public hospitalier et de l’Education nationale.
Dans ce contexte, aux côtés de l’AFS, la section 19 du CNU appelle nos représentant.es professionnel.les dans les différentes instances nationales et locales d’Universités et d’EPST (CNU, sections du CoNRS, CA, CFVU, UFR et Départements…), à prendre la mesure des conséquences qu’aurait une application même partielle du rapport Gillet sur nos conditions de travail,à relayer les revendications syndicales et à participer à toutes les mobilisations qui devront prendre place dès la rentrée 2023.
Pour nos étudiant.es, pour une science non inféodée aux pouvoirs politiques, pour le service public, mobilisons- nous !
Toulouse, le 5 septembre 2023