15 Jan Motion du CNU « Suppression de la qualification aux fonctions de professeur·es » (janvier 2019)
Le CE de l’AFS a décidé d’apporter son soutien à la motion votée par la 19ème section du CNU.
Texte de la motion:
« Suppression de la qualification aux fonctions de professeur·es une reforme autoritaire déjà désastreuse »
Les membres de la 19e section du Conseil National des Universités (CNU), réuni·es à titre extraordinaire en visioconférence le 11 janvier à 18 h 00, ont pris connaissance de la décision du Ministère de dispenser de qualification par le CNU les candidat·es aux fonctions de professeur·es dès cette année, au mépris de son engagement à ne mettre en application la Loi de Programmation de la Recherche que l’an prochain et d’engager une discussion sur ses décrets d’application. Encore une fois prise sans concertation, cette décision intervient très tardivement (le vendredi 8 janvier dernier), alors que les candidat·es avaient déjà préparé et déposé leurs dossiers sur l’application Galaxie du CNU, au prix d’un effort conséquent dans un contexte marqué par la surcharge de travail due au confinement. Ces candidat.es seront pourtant privé.es de la reconnaissance d’une instance nationale alors même que le travail d’évaluation de leurs dossiers avait démarré. Jamais dans l’histoire de l’université ne s’était affiché un tel mépris du travail des universitaires !
Même si, d’un point de vue juridique, la seule promulgation de la loi suite à la décision du Conseil Constitutionnel suffit à supprimer la qualification, se donner le temps de la rédaction négociée des décrets d’application permettait d’aménager une année de transition et d’ouvrir la discussion promise par la Ministre. Les sections du CNU sont donc confrontées à la double peine de subir une réforme autoritaire à la faveur du confinement et de devoir assumer l’instabilité juridique que génère cette hâte inexplicable.
Les membres de la 19e section expriment donc leur plus vive inquiétude s’agissant des conséquences de cette suppression sur la campagne de recrutement à venir et à plus long terme. Soulignons d’abord les transferts de coût massifs que vont représenter les examens des dossiers par les universités sans filtre préalable. Les comités de sélection locaux devront désormais examiner un nombre beaucoup plus important de candidatures : la taille des comités de sélection devra en être redimensionnée, ce qui augmentera les coûts d’organisation en charge d’établissements souvent déjà en difficultés financières. De la même manière, les collègues membres des comités de sélection (COS) devront réaliser un travail supplémentaire, en surcroît de toutes leurs missions d’enseignement et de recherche, au moment où le Ministère dit défendre la compétitivité de la recherche. Désormais, un même dossier sera évalué plusieurs fois par plusieurs comités là où le 1CNU évaluait, une fois pour toutes, les aptitudes académiques disciplinaires, laissant aux COS le soin d’instruire les proximités aux profils de poste et de hiérarchiser les candidat.es.
Les membres de la section insistent aussi sur la difficile gestion de l’ancrage disciplinaire que les universités et les COS auront maintenant à apprécier puisqu’en 2020, 50 % des demandes de qualification aux fonctions de PU provenaient de candidat.es n’ayant pas soutenu des HDR en sociologie-démographie ! Les enjeux pédagogiques et scientifiques sont énormes et reposent entièrement sur des établissements n’ayant pas toujours les ressources nécessaires à ce filtrage. Les membres de la section mettent en garde la Ministre contre un risque accru de judiciarisation des recrutements dont elle devra assumer seule la responsabilité. Pour les candidat.es, le recours contentieux sera désormais la seule réponse possible aux établissements qui seraient tentés de procéder de manière clientélaire ou dont les COS, submergés de demandes, auraient inégalement traité les dossiers de candidature soumis.
Enfin, la section 19 souligne combien cette suppression du cadrage national collégial ouvre la voie à une reprise en main politique de la gestion de l’entrée dans la fonction publique d’enseignement supérieur et de recherche et du déroulement des carrières. Il est essentiel d’expliquer que, après la nomination extrêmement controversée d’un proche conseiller du Président de la République à la présidence du Haut Comité à l’Evaluation de la Recherche (HCERES), le risque est réel d’un transfert sans discussion des procédures de titularisation et d’évaluation des carrières vers cette institution. La mission d’évaluation des dispositifs dérogatoires à la qualification pour les MCF qui pourrait lui être confiée préfigure cette reprise en main. Un tel transfert ouvrirait la voie au fait du prince et à un clientélisme politique débridé, puisque le HCERES procède par comités nommés par son exécutif et non élus par les pairs.
Ayant longuement débattu sur les moyens d’action à mobiliser face à ce nouveau coup de force, la section décide :De procéder à l’examen des dossiers de qualification aux fonctions de maîtres de conférences comme prévu afin que les candidat.s actuel·les, déjà malmené·es par la crise sanitaire et la précarisation massive des métiers scientifiques, puissent se présenter à l’ensemble des postes mis au concours cette année selon un calendrier qui, lui, demeure. Ce faisant, la section 19 entend également souligner le contraste entre cette procédure et les procédures dérogatoires que les établissements seraient tentés d’expérimenter dès cette année. Il convient de donner à lire, par tous les moyens, que la qualification nationale est à la fois plus juste, plus égalitaire et plus efficiente.
1- D’appeler les président·es d’université à refuser l’emploi de cette procédure dérogatoire pour les MCF et les collègues élu·es dans les conseils compétents de leurs établissements à manifester la plus grande vigilance sur la rédaction des profils de postes ;
2- D’appeler tou·tes les collègues à tenir ferme dans le refus de participation aux procédures menées par le HCERES.
3- De diffuser l’information le plus largement possible pour que les décisions simultanées de retenir l’université en confinement et de mettre à mort la collégialité dans les procédures d’évaluation soient comprises pour ce qu’elles sont : une régression vers l’autoritarisme et le népotisme.
4- De diffuser l’information le plus largement possible pour que les décisions simultanées de retenir l’université en confinement et de mettre à mort la collégialité dans les procédures d’évaluation soient comprises pour ce qu’elles sont : une régression vers l’autoritarisme et le népotisme.
Elle demande au MESRI :
- l’ouverture sans délai de la concertation annoncée par la Ministre sur l’ensemble des processus de recrutement,
- la nécessaire prise en compte d’un cadrage national, garant des pratiques disciplinaires reconnues