La thématique générale du Congrès invite
1/ à une analyse des trajectoires des individus dans leur circulation dans une “pluralité d’environnements (spatial, social, matériel, politique, professionnel, etc.), dans lesquels ils font l’expérience des inégalités de classe, de genre, de race, d’âge, etc.” Dans le champ des migrations, les questions de territoire, de frontières sociales et spatiales agissent sur les expériences des individus, des institutions révélant des facteurs d’inégalités sociales et spatiales. (Exemple : le rôle des nouveaux mouvements religieux qui prêchent dans des églises transnationales en appelant les fidèles à prendre soin de la Terre, car cela reviendrait à prendre soin de son prochain tel qu’il est enseigné dans la Bible).
2/ à une analyse des transformations des territoires de départ (pays de départ) du point de vue des empreintes écologiques qui transforment à la fois les conditions de vie des personnes qui s’exilent, mais aussi l’économie qui y est menée (Exemple : gestion des déchets…). Ces transformations ont un impact sur les raisons des départs (crise climatique), mais aussi sur l’internationalisation des formes du capitalisme dans les délocalisations d’activités polluantes, logistiques…
Ces transformations ont des impacts très importants sur les trajectoires des territoires et des individus.
Le RT2
Migrations, altérité et internationalisation a toujours porté l’intérêt pour ces thématiques au travers de l’analyse de phénomènes migratoires, en interrogeant les frontières disciplinaires entre sociologie et anthropologie afin de favoriser une approche des migrations ouverte aux comparaisons et attentive à l’intersectionnalité. Puis au travers des concepts de familles, transmissions et expériences, points d’observation privilégié des dynamiques de reproduction et de changement social. Enfin au travers des concepts, idées des rapports sociaux que sont le travail, les inégalités, les discriminations et résistances. Ce congrès sera donc l’occasion de ré-interroger les axes de notre RT2 à la lumière des propositions d’axes suivants.
Les propositions de communications pourront donc poursuivre ces réflexions dans le cadre de l’appel général de ce congrès, en s’inscrivant dans l’un des quatre axes suivants :
Axe 1 : Territoires, expériences, dispositifs : les personnes en migration dans leurs environnements quotidiens.
Responsables : Audran Aulanier, Sarra Chaieb, Laura Odasso
La sociologie, à trop considérer l’environnement comme une contrainte ou à se pencher sur le sens donné par les personnes à un environnement extérieur, ne prend pas complètement en compte la co-participation de l’organisme et de l’environnement dans les activités humaines. Dans cet axe, nous voulons au contraire recevoir des propositions qui décrivent au ras du sol les transactions entre les migrant.es et leurs environnements quotidiens afin de comprendre les manières dont les événements se transforment en vécus, mais aussi en pensées et discours. Concrètement, cela implique de se pencher sur le rapport à l’espace des migrant.es, sur les affordances qu’elles trouvent dans les espaces extérieurs et qui leurs permettent de « tenir ».
Mais les environnements des personnes en migration sont aussi peuplés de documents, qui les affectent très littéralement et deviennent des choses auxquelles elles pensent et dont elles parlent. Il s’agit alors de réfléchir aux articulations entre espace, matérialité documentaire et rapports aux institutions. Cela est envisageable d’une part à partir de l’étude des documents eux-mêmes, dans leur importance pour le maintien de soi des personnes. Cela est aussi envisageable, d’autre part, en se penchant sur le rôle de nombre d’intermédiaires, que les migrant.es rencontrent au quotidien. Si la littérature commence à bien documenter le travail des acteurs spécialisés de la cause des étranger.ères, celui des acteurs.ices intermédiaires non spécialisé.es dans le droit de la migration reste encore peu explorée. Pour autant, ces acteurs.ices locaux.les participent de l'accès au droit commun tout en faisant avec la situation de migration de leur interlocuteur.ices. Ils et elles manipulent des documents administratifs, des papiers d'identité, des preuves médicales liées à l'âge et à la santé, des attestations d'ancienneté sur le territoire, de prise en charge, de domiciliation,
etc., toutes sortes de documents qui contribuent aux formalités administratives et fonctionnent comme des preuves matérielles pour l’accès aux droits. Leurs actions façonnent ainsi l’environnement des personnes en migration, ainsi que la compréhension de leur processus d’insertion et de stabilisation, en faisant des « papiers » un nouveau
médium de l’expérience quotidienne.
À ce titre, on peut se demander comment ces acteur.ices non spécialisé.es font avec les expériences migratoires de leurs interlocuteur.ices, mais aussi avec les attentes institutionnelles. Quel rôle occupent-ils dans leurs parcours d’accès aux droits sociaux ? L’action de ces acteurs.ices s’inscrit dans un environnement spatial souvent circonscrit, marqué par des dispositifs spécifiques relevant des quartiers prioritaires de la ville, de choix, de positionnement politique des villes ou des départements. Cela questionne les modalités par lesquelles l’environnement local participe à produire ou au contraire à atténuer les effets des politiques migratoires contraignantes sur l’environnement quotidien des personnes migrantes.
À partir de ces réflexions, cet axe interroge finalement ce que le territoire fait aux aspirations et aux trajectoires migratoires, mais aussi ce que les présences migrantes font aux dispositifs territoriaux et aux acteurs.rices qui les mettent en œuvre – c’est-à-dire qu’il propose de réfléchir aux transactions entre les espaces et les migrant.es, qui affectent leur agir.
Axe 2 : Les rapports de race à l’aune des inégalités territoriales
Responsables : Elodie Druez, Hamida Azouani-Rekkas, Djamel Sellah, Simeng Wang
Les travaux s’intéressant aux rapports de race mettent en lumière le poids des dynamiques territoriales à l’œuvre dans les processus de minorisation raciale (Safi 2013). De fait, les individus minorisés racialement sont inégalement répartis sur le territoire (Fromentin et Pistre 2021), se concentrant dans les grands centres urbains (Crul et al. 2023),
a fortiori dans des zones urbaines moins privilégiées marquées des niveaux de ségrégation raciale notables (Safi 2009 ; Préteceille 2009). Cet axe entend interroger le poids de la minorisation raciale dans différentes configurations territoriales (des espaces ruraux, des quartiers bourgeois, en voie de gentrification, populaires, etc.), en considérant les degrés de mixité raciale et socioéconomique de l’environnement dans lequel ces personnes évoluent au quotidien (Lacy 2007). Il s’agit également de se pencher sur l’effet des circulations quotidiennes dans différents espaces sociaux (Anderson 2022) ainsi que sur les mobilités spatiales de plus long terme (Barwick 2020). Cette réflexion soulève trois questionnements principaux auxquels les propositions de communication sont invitées à répondre :
- Comment le contexte territorial façonne-t-il les expériences de racisation ? Dans quelle mesure des environnements mixtes racialement – ou à l’inverse majoritairement blancs – sont-ils susceptibles de limiter certaines interactions racisantes et d’en exacerber d’autres ?
- En quoi l’environnement spatial influe-t-il sur les trajectoires des individus minorisés racialement et notamment sur les dynamiques de reproduction sociale, de mobilités ascendante ou descendante ?
- Quel est le poids des environnements de socialisation dans la construction des identifications minorisées ainsi que dans la propension à (d)énoncer le racisme ? En quoi le territoire est-il en jeu dans les stratégies de résistance à la racisation ? Comment analyser les choix résidentiels (sous contrainte) mis en œuvre par les individus minorisés racialement ?
Axe 3 : Les frontières mouvantes du travail, d’un territoire à l’autre.
Responsables : Adrien Lusinchi, Annélie Delescluse, Delphine Mercier et Martin Pontier
Que ce soit dans leur pays d’origine, au cours de leur trajectoire migratoire, ou dans une société d’accueil, les personnes migrantes (281 millions en 2020 selon l’ONU) travaillent. Que ce soit durant une trajectoire migratoire - l’expérience des personnes migrantes est marquée par une pluriactivité (Tcholakova, 2012) - ou dans une société d’accueil, leur travail est façonné par les différents environnements qu’elles traversent ou au sein duquel elles s’installent plus durablement.
D’abord parce que ces environnements correspondent à des territoires administratifs, dont les règles portant sur le travail migrant sont fixées par une autorité politique. Un grand nombre d’entre ces exilé·es sont contraint·es de travailler « clandestinement » afin de subvenir à leurs besoins (Véron, 2024). Certaines expérimentent une forme de travail forcé - voir d’esclavage - au cours de leur trajectoire migratoire quand d’autres exercent des emplois fortement rémunérés et dans un cadre légal (Wagner, 2020). En ce sens, les frontières que les personnes migrantes traversent définissent la forme du travail qu’elles pourront exercer ou non, délimitent le périmètre de ce travail, et dressent des frontières entre qui a le droit ou non d’exercer un travail dans un cadre légal.
Au-delà des seules règles juridiques, l’action publique d’immigration et d’intégration qui s'adresse aux personnes migrantes participe aussi à définir les frontières du travail, et la possibilité d’accéder à un emploi ou non. Elle joue d’abord différemment, selon les territoires, sur le temps de l’accès à l’emploi des personnes migrantes en fonction de leur statut juridique (Bevelander, 2016 ; Brell et al., 2020 ; Décosse, 2011 ;Korac, 2003). En alternant entre contrôle des unes et volonté d’intégrer celles amenées à rester durablement sur un territoire, souvent le plus rapidement possible et dans une logique de
workfirst, l’action publique d’immigration et d’intégration aboutit à des effets contradictoires quant à la possibilité d’accéder à l’emploi (légal) ou non (Tcholakova, 2013 ; Héran, 2023 ; Lusinchi, 2024).
L’environnement que les personnes migrantes traversent ou dans lequel elles s’installent, définit donc pour ces dernières les frontières du travail et les conditions de son exercice. Et si les frontières du travail dépendent de l’environnement, le travail de l’environnement alimente également de nouvelles frontières. Par exemple : Certains territoires sont attribués au recyclage et aux récupérateurs. En effet, depuis une vingtaine d'années, l’économie de la gestion des déchets est devenue une activité de grand rendement, organisée à l’échelle mondiale. Ces activités de tri, de gestion, de stockage des déchets ont été souvent délocalisées dans les pays du ‘sud’ global provoquant de nouvelles inégalités territoriales.
Nous proposons de discuter dans cet axe de la manière dont l’environnement, au sens le plus large possible, fixe les frontières du travail, entre territoires comme à l’intérieur d’un même territoire, exclut ou intègre dans une forme légale d’exercice d’un travail, détermine les conditions d’exercice de ce travail pour les personnes migrantes, délocalise à l’international ou délocalise sur place (Mercier, 2021).
Cet axe propose de réfléchir et questionner plusieurs articulations : 1- ethnicisation des relations professionnelles dans les différents secteurs, 2- processus de production et d’organisation des secteurs, 3- le travail en tant que tel (l’activité), 4- les territoires du travail. Les propositions de communication s’inscrivant dans cet axe pourront ainsi approfondir ces questions autour de l’articulation entre environnement, territoires (traversés) et travail migrant.
Axe 4 : Que dit l’approche intersectionnelle à la sociologie des inégalités environnementales ?
Responsables : Sofiane Mahi et Djaouidah Séhili
L’intersectionnalité permet d’aborder les processus relationnels en tant que rapport de pouvoir à l’œuvre dans les différents environnements et la manière dont ils s’articulent avec les rapports de race, genre et classe (Bilge, Collins, 2023). C’est certainement en cela que ce concept est particulièrement heuristique à la compréhension des complexités inhérentes aux discriminations et inégalités (Rodriguez
et al., 2016). Sans prétendre être une forme « d’écologie humaine » (Rhein, 2003), l’approche intersectionnelle nous renseigne sur les interrelations dynamiques entre les populations humaines et les caractéristiques abiotique, biotiques, culturelles et sociales de leur environnement.
En France, cette approche a été importée des États-Unis, débattue et mise en pratique, à partir des années 2000 pour éclairer la situation de personnes « dominées » dans la division du travail (Guénif-Souilamas, 1999). Dès les années 1960, les études ont montré que les femmes représentent la moitié des populations migrantes. Les processus migratoires, les expériences des migrant(e)s, les impacts sociaux et politiques des migrations sont genrés (Catarino,Morokvasic, 2005). Le genre peut faciliter ou limiter la mobilité et l’installation, en influant sur les départs, les modalités des flux, l’accès à l’emploi ainsi que sur les modifications des rapports consécutifs à la migration.
La figure des migrantes sont donc diverses (Avril, Cartier, 2019). Elles immigrent pour des raisons différentes et dans des conditions historiques et politiques à chaque fois spécifiques. Pour autant, qu’elles accèdent aux métiers du care généralement précaires ou à l’entrepreunariat, elles n’en subissent pas moins des formes d’oppression liées aux préjugés de genre, mais aussi de race et de classe (Aït Ben Lmadani, Moujoud, 2012). Ces dominations spécifiques nous invitent à une analyse des trajectoires des migrantes dans leur circulation dans la pluralité d’environnements (spatial, social, matériel, politique, professionnel, etc.) dans lesquels elles en font l’expérience. Elles nous invitent également à porter un regard sur les transformations que ces dominations produisent dans les territoires dits de départ et d’arrivée.
Les propositions de communication s’inscrivant dans cet axe pourront ainsi approfondir ces réflexions.
Consignes de réponse à l’appel à communication
Les propositions de communication prendront la forme d’un document unique comportant les éléments suivants :
- Nom.s, prénom.s du/des auteur.e.s
- Statut.s et institution.s de rattachement
- Adresse.s mail
- Titre de la communication
- Résumé de la proposition (3000 signes espaces compris)
- 5 mots-clés
- Format Word, afin de faciliter une évaluation anonyme
Les propositions de communications seront à déposer uniquement sur le site de l’AFS via la plateforme du RT 2 avant le
15 janvier 2025.
La décision du comité d'organisation sera communiquée aux auteur.e.s le
15 février 2025.
RAPPEL
"Pour participer au Congrès, il faudra adhérer à l’AFS et s’acquitter de droits d’inscription. Lors du précédent Congrès de 2023, l’adhésion s’élevait à 41€ pour les non-titulaires et 103€ pour les titulaires ; l’inscription au Congrès à 61€ pour les non-titulaires et 152€ pour les titulaires. Les tarifs pour le Congrès de Toulouse seront légèrement plus élevés (inflation). Les collègues non-titulaires qui ne peuvent être
financé.es par leur laboratoire pourront, sur présentation de dossier, être
exonéré.es des droits d’inscription et bénéficier d’une aide pour le transport et le logement. La procédure pour la demande d’exonération des droits d’inscription sera précisée plus tard.
L’accès au Congrès se veut le plus inclusif possible :
* Des dispositifs de lutte contre les violences sexistes et sexuelles seront mis en place.
* Si vous avez besoin de services d’accompagnement en raison d’une situation de handicap, vous pourrez le signaler dans le cas où votre communication est retenue. Le comité d’organisation mettra tout en œuvre pour essayer de répondre à vos demandes.
* Si vous avez besoin de services de crèche pendant le Congrès vous pourrez le signaler au moment de l’inscription. Le comité local essayera de proposer un mode de garde."