Environnement(s) et inégalités des formes de consommation en régime numérique - Appel du RT11 Sociologie de la consommation et du numérique
Congrès AFS 2025, « Environnement(s) et inégalités »
8 - 11 juillet 2025, Toulouse
Appel à communication du RT11 : Sociologie de la consommation et du numérique
Environnement(s) et inégalités des formes de consommation en régime numérique
Date limite de dépôt des propositions : 17 janvier 2025
La consommation participe à la caractérisation et à la différenciation des mondes sociaux. Qu’elle soit abordée par les notions d’appropriation, de routine, d’appariement sur les marchés ou de distinction, la consommation se trouve toujours à l’intersection de plusieurs de ces mondes – et en premier lieu comme enjeu d’accès inégal à certaines ressources comme l’énergie, les transports, l’alimentation. Les usages des technologies numériques – dont on commence à peine à mesurer l'impact sur l'environnement naturel – se sont par ailleurs affirmés depuis quelques décennies comme des éléments restructurants des mondes sociaux. Sans altérer pour l’essentiel la nature des dynamiques sociales déjà en place, ils ont participé à en reconfigurer les modalités et se sont dans beaucoup de cas tant et si bien intégrés aux environnements de nos pratiques et relations professionnelles comme personnelles, qu’ils en deviennent une infrastructure dont les effets sont parfois peu visibles. Le coût écologique des usages croissants des technologies numériques est par ailleurs mal connu et encore très peu interrogé lorsqu’il est question d’écologisation des pratiques de consommation.
Que devient la consommation, au-delà du mot d’ordre politique, lorsqu’elle « s’écologise » ? Les inégalités sociales et les rapports de force mis au jour par la consommation sont-ils transformés, et interrogés ou reconduits et renforcés par la question environnementale comme par les récents développements technologiques ? Comment se traduisent ces changements et comment dialoguent-ils avec les évolutions matérielles et sociales des espaces et du travail marchand ?
Pour le RT 11, l’enjeu de ce congrès de l’AFS est de se saisir du thème “Environnement(s) et inégalités” au prisme d’une tradition de recherche qui s’attache à penser la consommation,, le numérique et leurs enchevêtrements.
A cette fin, nous proposons cinq axes, dont deux (Axe 4 et 5) correspondent à des sessions croisées avec les RT12 (Sociologie économique) et RT 48 (Articulation des Temps Sociaux). Les propositions de communication pourront ainsi principalement – mais non exclusivement – se situer par rapport aux entrées déclinées ci-dessous.
NB : Les propositions pour l'appel général du RT11 (Axe 1,2 et 3) doivent être déposées via le site de l'AFS en utilisant le formulaire de la page de l'appel - ci-dessous, celles pour les sessions croisées devront être déposées via le site de l'AFS sur les pages qui y sont dédiées (RT11-RT12 ou RT48-RT11).
Axe 1 - Écologisation, inégalités sociales et rapports de force dans les pratiques de consommation.
L’écologisation des pratiques est un mot d’ordre de plus en plus présent dans les politiques ayant pour objectif de faire advenir une transition environnementale et un développement plus durable de nos économies et de nos sociétés. Si l’écologisation renvoie directement aux enjeux économiques, symboliques et moraux qui façonnent les pratiques, elle suppose une transformation de la consommation. Par delà la capacité à rendre ses pratiques plus “écologiques” ou “responsables”, les inégalités se jouent également dans les manières de faire face ou d’être exposé aux impacts de la dégradation de l’environnement ou aux conséquences du réchauffement climatique et, d’une certaine façon, aux modes de consommation d’autres personnes et groupes sociaux. La connaissance de la distribution sociale actuelle des coûts écologiques liés à la consommation est encore en cours de construction et celle de la distribution des efforts vers une consommation plus écologique et moins impactante à l’échelle globale est déjà l’objet de controverses. Derrière la supposée nécessité d’un nouveau gouvernement des conduites de consommation, la question écologique illustre ou met en exergue des inégalités en la matière – de genre, de classe, de territoire – anciennes mais reformulées, et remises en lumières au point de faire advenir des conflits ou crises politiques comme celle des Gilets Jaunes. Ainsi, en 2018, ces derniers ont rappelé comment un projet de taxe écologique sur les carburants pouvait mettre au jour les spécificités des modes de vie périurbains et ruraux, lieux de résidence et de vie de classes moyennes et classes populaires.
Notre premier axe appelle ainsi des propositions permettant de discuter des effets attendus et moins attendus, positifs ou négatifs, sociaux et politiques de l’écologisation, par le bas, c’est-à-dire en partant des pratiques de consommation. Comment l’écologisation (re)produit-elle des inégalités ? Comment les pratiques qui s’en réclament répondent-elles aux injonctions sur les conduites et aux discours aussi bien politiques que commerciaux ? En somme, comment les différents acteur·ices de la consommation au sens large peuvent aujourd’hui s’en emparer ?
Axe 2 : Une consommation “alternative”? Trajectoires, dispositifs, engagement et travail marchand
L’engagement politique de certains individus peut les conduire à (ré)orienter tout ou partie de leur consommation, au point d’adopter et de développer de nouveaux modes de vie. Leurs pratiques sont alors construites en opposition avec les formes de consommation ou de discours et attitudes hégémoniques vis-à-vis de la consommation.
Il peut alors s’agir de « faire moins », « faire soi-même », ou « faire sans » pour s’opposer au consumérisme marchand. Pour les sociologues de la consommation, l’étendue et l’intensité de ces pratiques posent de nombreuses questions : quelles sont les trajectoires qui mènent à la politisation de la consommation et des styles de vie ? Pour paraphraser une formule connue : comment peut-on être alternatif, et qui sont celles et ceux qui peuvent l’être ? Quels sont les hiérarchies et ordres moraux convoqués par ces pratiques dites alternatives ? En quoi nous invitent-elles à questionner à nouveaux frais les frontières entre consommation et production ? Sur quelles formes socio-matérielles et socio-économiques s’élaborent par ailleurs ces propositions, et font-elles modèle ? Comment sont construits et appropriés les dispositifs alternatifs de rencontre entre l’offre et la demande ?
Enfin cet axe appelle des contributions portant sur la façon dont ces formes politiques ou infrapolitiques de la consommation se traduisent dans les espaces numériques. Comment analyser ces comportements en termes de distinction, d’adaptation au déclassement ou de hiérarchisation des groupes sociaux ? Ceux-ci sont traversés par des injonctions paradoxales qui valorisent à la fois une écologisation des pratiques et des pratiques de consommation polluantes (fast fashion, voyages…). Ce deuxième axe se propose donc d’analyser l’engagement écologique en ligne à travers une double perspective. D’un côté, les militants numériques et leurs “suiveurs”, qui peuvent à leur tour générer des formes d’engagement alternatives, souvent plus perméables. De l’autre, celles et ceux qui cherchent à nier ou à disqualifier la cause écologiste en ayant recours aux mêmes outils numériques que celles et ceux qui la soutiennent. Les espaces numériques sont aussi interrogés dans leur capacité à proposer de manière socialement différenciée et inégale des ressources à la fois sociales, matérielles et informationnelles qui équipent les différentes formes d’engagement au regard de l’environnement et de la consommation, à travers entre autre l’activité des influenceur·euses sur les médias sociaux.
Axe 3 - Environnements et évolutions des places de marché : du travail marchand aux styles de vie
Les environnements techniques, politiques et sociaux du commerce ont connu récemment d’importantes évolutions. Cet axe invite à une meilleure compréhension des évolutions des formes contemporaines du commerce, précisément sous l’effet de la numérisation et de l’écologisation des pratiques. Quel impact ont en particulier les outils et ressources numériques sur le travail marchand ? Comment les technologies et supports numériques sont-ils entrés dans l’environnement des commerces, que ce soit pour équiper le travail des consommateur·ices ou celui des vendeuses et vendeurs ? Comment affectent-ils la consommation in situ, mais aussi dans le temps long ? Les propositions appelées pourront porter sur la façon dont les professionnels du commerce et de la vente (en articulation ou non avec leur clientèle) produisent ou travaillent une offre alternative à celle de la grande distribution. Comment l’écologisation des pratiques de consommation se traduit-elle dans les dynamiques de l’intermédiation marchande et dans les ressorts et appuis du travail marchand ?
Ce troisième axe encourage également les contributions s’intéressant aux pratiques qui articulent fortement consommation, travail des consommateur·ices et styles de vie, comme dans le cas du “fait maison” ou du recyclage. Dans ces pratiques d’auto-production et d’échanges plus ou moins marchandes, l’écologie n’est pas systématiquement évoquée comme une raison d’agir, bien qu’elles peuvent se justifier, entre autres, par une rationalité écologique ou militante comme en témoigne la liste non exhaustive ci-après : bricolage et récupération en dehors du circuit marchand ; covoiturage ; production et consommation des produits « bio » et « écoresponsables » (local, home made) ; les productions à la maison (ex. fabrication du pain, des vêtements). Cet axe interroge ainsi la constitution et le fonctionnement des « places de marché » secondaire ou d’occasion des biens culturels ou objets du quotidien qui, notamment, peuvent se déployer lors d’échanges hors ligne (brocantes, troc, dons) et en ligne (plateformes Vinted, le Boncoin, etc.).
Par conséquent, en questionnant autant les environnements techniques et écologiques, il s’agit de comprendre à quel(s) moment(s) ces pratiques interviennent dans les parcours de consommateur·ices ? Dans quelle mesure sont-elles inscrites dans des styles de vie et modes de consommation socialement marqués ? Quelles sont les variations sociales de ces pratiques et de leur appropriation ? Quelle est la place de ces pratiques de récupération et de réparation dans le quotidien des groupes sociaux ?
Axe 4 - Temporalités et matérialités des environnements numériques
(Session croisée avec le RT48 “Articulation des temps sociaux”, soumettre les propositions en réponse à l'appel de session croisée dédié)
Cette session croisée des RT11 (Sociologie de la consommation et du numérique) et RT48 (Articulation des temps sociaux) invite les contributions à explorer les “environnements” au-delà du seul rapport à l’écologie, et plus précisément en lien avec le numérique. Lorsqu’il est question des « environnements numériques », ceux-ci sont ordinairement pensés comme un ensemble d’outils visant l’optimisation, la rationalisation et la quantification des productions et des activités (ENT, self-tracking, agendas partagés, logiciels de pointage, bases de données en ligne, etc.). La session croisée propose de penser ces « environnements numériques » au prisme de la rationalisation, mais aussi par ses dimensions temporelles et matérielles. Comment les espaces et outils numériques s’intègrent-ils concrètement dans les activités quotidiennes ? Quels arrangements permettent-ils ? Quelles sont les influences de ces équipements en termes d’organisation et d’articulation des temps domestiques, professionnels et de loisirs ? Enfin, comment les environnements numériques favorisent-ils l’émiettement ou l’accélération des temps et des tâches du quotidien ?
En plus de leur coût de production (économique comme écologique), qu’en est-il du coût social et d’usage ? Se pose ici la question de l’accessibilité de ces « avancées technologiques ». Qui est en mesure de les acquérir ? Outre le coût d’achat, quel est le coût d’appropriation ? Comment ces pratiques varient-elles en fonction des caractéristiques sociales des personnes ? Comment ces environnements et outils numériques participent-ils à la fabrique des inégalités sociales ?
Au-delà de la question de leur accessibilité, cette session a également pour objectif d’interroger les effets sur la répartition des tâches quotidiennes, et notamment sur l’orchestration des tâches domestiques, de production et de consommation. Comment les personnes s’organisent-elles, et de quelles manières le numérique leur permet de tenir leurs différents engagements ? Comment les personnes reconfigurent-elles la coordination du quotidien entre domicile, lieu de travail et autres activités (loisirs, associatives, civiques) ? Comment ces arrangements sont-ils négociés ?
Enfin, outre des pratiques concrètes d’articulation ou d’orchestration du temps et des activités, il peut s’agir de questionner la façon dont sont conçus et produits les environnements numériques. Du côté des créateurs et des promoteurs de ces environnements et de ces outils, comment sont-ils pensés et promus ? Avec quelles justifications (économie de temps, d’argent, de ressources…) ? Dans quelles mesures les questions relatives à l’articulation des temps sociaux et plus généralement leurs usagers sont-ils pris en compte par les concepteurs ?
Axe 5 - Écologisation et effets environnementaux des flux de consommation ordinaire
(Session croisée avec le RT12 “Sociologie économique”, soumettre les propositions en réponse à l'appel de session croisée dédié)
Cette session croisée entre le RT11 (sociologie de la consommation et du numérique) et le RT12 (sociologie économique) vise à explorer l'effet environnemental de la consommation ordinaire. Nous faisons référence ici aux produits de consommation courante, parfois invisibilisés dans les recherches par leur dimension routinière et familière (habillement, produits d’ameublement, produits d’entretien, produits hygiéniques, etc.). Pour autant, ces marchandises présentent un enjeu économique majeur pour les acteurs de la distribution en ligne ou hors-ligne, des marchands à l’ensemble de ses prestataires en amont ou en aval comme les services logistiques, qui déploient une série d’offres visant à automatiser, accélérer ou reconfigurer les logiques de leur consommation (drive, abonnements, etc.). Nous invitons les propositions à problématiser la question des flux de marchandises et leur dimension écologique dans une perspective dynamique et relationnelle.
Cette session croisée pose d’abord la question de l'évolution des flux de marchandises et de leurs effets environnementaux. Il s’agira ici de considérer l’accélération de ces flux, leur (dé)matérialisation ou leurs effets sur l’extension des frontières de marché. Sur quels dispositifs matériels et économiques reposent-ils ? Comment s’articulent-ils à des chaînes de valorisation ou d’échange non marchand (don, troc, échange, partage, etc.) ? Quels en sont les effets sur la consommation ? Il est ici possible de proposer des approches monographiques ou biographiques de marchandises, afin de retracer leurs effets environnementaux au long des espaces sociaux, en ligne et hors ligne, et des espaces physiques qu’elles traversent.
La session pose ensuite la question de l’extension de la question écologique à de nouveaux flux de marchandises
. On peut penser au rôle du numérique dans l’extension de la sphère marchande à des pratiques jugées récréatives jusqu’alors, à des pratiques de maintenance et de réparation, à l’écologisation des pratiques de consommation ordinaire (fabrication de produits de beauté ou d’entretiens, réduction des déchets, recyclage, etc.) ou à l’essor des marchés de seconde main (livres, habits, etc.). Ces pratiques nouvelles de consommation ne sont pas sans générer ou intensifier des flux de marchandises préexistants faisant peser le risque de potentiels « effets rebond » (accélération des rythmes de consommation notamment). Le rôle des plateformes en ligne et des médias sociaux se pose aussi quant à la manière dont sont qualifiées les marchandises, faisant entrer de nouvelles échelles de valeurs, de nouvelles catégories ou de nouveaux standards pour en déterminer la valeur (marchande, mais aussi environnementale). Comment donc se rencontrent, se conjuguent, s’amplifient ou s’atténuent les effets environnementaux des flux de marchandise à l’heure d’une numérisation des pratiques et des équipements de consommation ?
Enfin se pose la question des effets environnementaux des logistiques de consommation associées à ces flux
: livraison, lockers, vélos cargos, déplacements des consommateurs, etc. L’intensification des flux de marchandises, alimentée par la numérisation des espaces de commerce, entraîne une transformation des espaces et des infrastructures urbaines et périurbaines qui invite à penser la matérialité, la spatialité, les temporalités voire les évolutions infrastructurelles qui supportent l’avènement de ces nouveaux flux de consommation. Quels sont les effets des espaces en ligne (médias numériques, plateformes, etc.) sur l’orientation des flux de marchandises et sur les environnements physiques ? Comment les sciences sociales peuvent-elles penser les effets environnementaux de l'évolution de ces modalités d'enchevêtrement entre consommation et échange ?
Modalités de soumission
Les propositions de communication sont à déposer sur le site de l’AFS avant le 17 janvier 2025 en précisant l’axe dans lequel s’inscrit votre proposition. Elles devront comporter les nom, prénom, institution de rattachement et adresse mail du ou des auteurs, le titre de la communication, mots clés (6 max) et, en moins de 5000 signes, une présentation du sujet : question traitée, méthodologie de la recherche, le cas échéant terrain étudié, résultats mis en avant, bibliographie indicative.
Les propositions seront anonymisées et évaluées collectivement par les membres des bureaux des RT concernés (le RT11 pour les axes 1 à 3 ; le RT11 et le RT48 pour l’axe 4; le RT11 et le RT12 pour l’axe 5 ).
Rappel :
Les propositions pour l'appel général du RT11 (Axe 1,2 et 3) doivent être déposés via le site de l'AFS en utilisant le formulaire de la page de l'appel, celles pour les sessions croisées devront être déposées via le site de l'AFS sur les pages qui y sont dédiées.
Informations importantes concernant le congrès
Pour participer au Congrès, il faudra adhérer à l’AFS et s’acquitter de droits d’inscription. Lors du précédent Congrès de 2023, l’adhésion s’élevait à 41€ pour les non-titulaires et 103€ pour les titulaires ; l’inscription au Congrès à 61€ pour les non-titulaires et 152€ pour les titulaires. Les tarifs pour le Congrès de Toulouse seront légèrement plus élevés (inflation). Les collègues non-titulaires qui ne peuvent être financé.es par leur laboratoire pourront, sur présentation de dossier, être exonéré.es des droits d’inscription et bénéficier d’une aide pour le transport et le logement. La procédure pour la demande d’exonération des droits d’inscription sera précisée plus tard.
L’accès au Congrès se veut le plus inclusif possible :
- Des dispositifs de lutte contre les violences sexistes et sexuelles seront mis en place.
- Si vous avez besoin de services d’accompagnement en raison d’une situation de handicap, vous pourrez le signaler dans le cas où votre communication est retenue. Le comité d’organisation mettra tout en œuvre pour essayer de répondre à vos demandes.
- Si vous avez besoin de services de crèche pendant le Congrès vous pourrez le signaler au moment de l’inscription. Le comité local essayera de proposer un mode de garde.
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