La communication analyse les allers-retours temporaires et leur signification dans la vie des hommes gays vivant en milieu rural. À partir d’ethnographie dans le Sud-méditerranéen de la France, nous explorerons les différences dans les expériences rurales des enquêtés dues à leur position sociale et à la pression sociale dans les villages. Pour se reconnecter dans les pratiques culturelles et sexuelles gays, les enquêtés produisent une circulent à l’intérieur de la région pour renégocier leur place à l’intérieur du milieu rural.
Andrea Zanotti – doctorant et chargé de cours
IRMÉCCEN (Université Sorbonne Nouvelle – France)
CEG (Université de Lausanne – Suisse)
andrea.zanotti@sorbonne-nouvelle.fr Axe 1.Je propose dans le cadre de cette communication de présenter les premiers résultats de ma thèse de doctorat, qui porte sur les trajectoires résidentielles et mobilitaires des travailleuses indépendantes du secteur des services à domicile (aide ménagère, aide à domicile, garde d’enfant) au sein de la métropole du Grand Paris. Les personnes rencontrées exercent leur activité (de façon déclarée ou non) à travers la proposition de leurs services sur des plateformes de petite annonces entre particuliers. J’ai pu observer, à la suite de la conduite d’entretiens de type biographiques avec 35 femmes, une articulation fine entre les stratégies spatiales professionnelles et résidentielles de ces femmes, en lien avec leur positionnement et dynamiques sociales.
Dans un contexte professionnel de forte variabilité / instabilité géographique et économique, quelles articulations peut-on observer entre trajectoires résidentielles et circulations professionnelles ?
Cette communication sera pour moi l’occasion de répondre à cette question à travers la présentation de mes résultats :
La présentation des parcours et trajectoires de plusieurs femmes rencontrées me permettra d’illustrer dans un premier temps plusieurs types de géographies professionnelles et résidentielles observées dans le cadre de mes recherches. Celles-ci témoignent de l'inégale capacité des femmes rencontrées à jouer de la contrainte spatiale et du coût de la mobilité induit par la forme auto-entrepreneuriale des services à domicile. La mise en évidence des singularités des parcours professionnels et résidentiels de ces femmes est néanmoins toujours pensée à travers une analyse structurelle des ressorts spatiaux des nouvelles formes d’emploi à la demande au sein des métropoles des Nords (Chaib, 2006).
Dans un deuxième temps, à travers un positionnement constructiviste des parcours résidentiels, et en m'intégrant dans une perspective Bourdieusienne de la notion de position résidentielle (Ripoll, 2013), je propose de réfléchir aux effets de socialisations que les circulations professionnelles dans des espaces résidentiels socialement différenciés, peut générer sur les champs des possibles résidentiels (Korsu, 2023) des travailleuses rencontrées. Dans quelle mesure les rapports de classe et de race à l’œuvre dans la socialisation à l’espace résidentiel de son employeur participent-ils à l’intériorisation d’une position subalterne au sein de l’ordre résidentiel ? (Bouillon, et al. 2019). Cette proposition théorique me permettra d'appréhender la question des localisations et stratégies résidentielles via les représentations que les actrices de ma recherche portent de l’espace urbain et résidentiel, leurs représentations de leurs propres places au sein de ces espaces, leurs projections et leurs socialisations aux espaces urbains et domestiques (Authier, 2012).
Bibliographie :
Authier, Jean-Yves. 2012. Espace et socialisation. Éditions Universitaires Européennes. https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00971322.
Chaïb, Sabah. 2006. « Femmes immigrées et emploi : le bas de l’échelle pour propriété ? » In Le bas de l’échelle, 146‑65. Questions vives sur la banlieue. Toulouse: Érès. https://doi.org/10.3917/eres.lelay.2006.01.0146.
Deboulet, Agnès, Florence Bouillon, Pascale Dietrich-Ragon, et Yankel Fijalkow. 2019. Vulnérabilités résidentielles. Editions De l’Aube.
Korsu, E., 2023, Champ des possibles résidentiels. Histoires drôles et sérieuses de déménagement, Editions des livres faits à la maison.
Ripoll, Fabrice. 2013. « 25. Quelle dimension spatiale des structures sociales chez Bourdieu ? Localisations résidentielles et jeux d'échelle dans La Distinction ». In Trente ans après La Distinction, de Pierre Bourdieu, 365‑77. Recherches. Paris: La Découverte. https://doi.org/10.3917/dec.coula.2013.01.0365.
Le turning point est une notion qui rend compte d’une rupture dans les pratiques et l’identité d’un individu. Elle est définie d’abord comme temporelle (Elder 1994; Bessin, Bidart et Grossetti 2009; Abbott 2009). Toutefois, empiriquement, elle est souvent analysée en relation avec des changements dans les espaces de vie (e.g., Chatterjee and Scheiner 2015), notamment des déménagements qui catalysent souvent d’autres changements, comme arrêter de conduire (Hackstaff 2009; Flamm, Jemelin and Kaufmann 2008). S’il existe des modèles temporels de changements radicaux (Abbott 2009; Berger et Luckmann 1991; Soulet 2009), ils intègrent peu la re-configuration spatiale vécue par l’individu en transformation.
Ainsi, l’objet de cette communication est de prendre au sérieux le caractère spatial des turning points —une métaphore spatiale, tout comme la conversion, l’alternation, la bifurcation, etc.— afin de mieux analyser leurs conditions de possibilité. Je m’applique notamment à analyser les lieux et les itinéraires qui conduisent à des turning points. C’est d’autant plus utile empiriquement que les périodes des turning points sont difficiles à saisir du point de vue temporel, en l’absence de suivi précis des individus qui l’expérimentent et du fait de la reconstruction temporelle du récit du changement par l’individu concerné (Bourdieu 1986; Pollak 1993).
Pour explorer certaines conditions de possibilité spatiales des turnings points, je m’appuie sur 40 entretiens semi-directifs réalisés dans deux ateliers d’autoréparation de vélo durant l’été 2019 et sur un mois d’observation participante dans les deux ateliers. Le premier atelier, "un p’tit vélo dans la tête" a été fondé à Grenoble et compte environ 1000 membres, tout comme le deuxième atelier, "En ville à vélo", situé à Annemasse. Ces deux lieux ont vocation à changer les habitudes des membres des ateliers dans le domaine de la mécanique vélo, en l’enseignant. Mais ces lieux sont aussi les vecteurs d'une contre-culture qui est adoptée par des individus qui cherchent à transformer radicalement leurs vies. C’est pourquoi j’ai interviewé à la fois des salariés, des ex-salariés, des bénévoles, des membres occasionnels, des nouveaux membres et des ex-membres des deux ateliers d’autoréparation de vélo. Les entretiens ont permis d’analyser les récits de changement d’habitudes et de modes de vie et d’identité des individus interrogés.
Empiriquement, le principal résultat de la communication est une typologie d’espaces qui rendent possible des turning points, tels: un lieu de vie central —un atelier d’autoréparation ici—, un réseau de lieux —de lieux associatifs et contre-culturels ici—, un itinéraire de voyage —soit exploratoire, soit vers un tiers proche—. Théoriquement, il s’agit de modéliser le turning point aussi en tant que rupture spatiale.
À partir d’une enquête de terrain menée entre 2016 et 2018 sur les mobilisations au sein de la "région portuaire" de Rio de Janeiro, je propose d’interroger le lien entre les trajectoires et ancrages spatiaux des habitants et les formes d’engagement dans lesquelles ils se trouvent impliqués, dans un contexte où les politiques de revitalisation, de déplacements forcés, et de répression violente du narcotrafic suscitent un rapport potentiellement conflictuel et contestataire à l’espace urbain. En circulant, contraints ou non, au sein de leur quartier, mais aussi en refusant d’être expulsés ou en choisissant d’occuper certains espaces, les habitants de la région portuaire tissent des réseaux de mobilisation, font vivre des lieux contestataires, et déploient des répertoires d’action qui apparaissent comme autant de modalités d’exercice (revendiqué ou non) d’un certain droit à la ville.
Axe de rattachement : Axe 1
Adresse de contact : david.amalric@gmail.com
Le lien entre migrations internes et dynamiques urbaines en République Populaire de Chine (RPC) a indéniablement évolué au cours des 40 dernières années. La publication du plan national d’urbanisation (2014-2020) préconise le passage d’un modèle de croissance centré sur le foncier à un modèle plus qualitatif axé sur les besoins de la population. Ce modèle réserve une place importante à la main d’œuvre migrante : 100 millions de migrants sont autorisés à s’installer durablement en ville et à accéder aux biens et services urbains. L’accès au logement pour cette population, laissée à l’écart des politiques sociales pendant 30 ans et n’ayant pas les moyens d’accéder au marché immobilier, figure parmi les principaux objectifs du plan qui préconise, par ailleurs, un rééquilibrage des inégalités socio-économiques et socio-spatiales. Dans ce contexte, la question de l’intégration des migrants en ville se chevauche avecla question foncière et immobilière tout en croisant la question du développement urbain. Des zones de contact de ces trois questions se dégage la problématique du rôle des migrants dans la reconfiguration socio-spatiale de l’espace urbain en RPC. Les politiques publiques, l’offre de logement, les choix et conditions résidentielles des migrants constituent des vecteurs d’analyse importants pour comprendre leur intégration au sein des villes chinoise.
Cette communication, qui s’appuie sur ma recherche doctorale, se penche sur l’ensemble de ces dimensions, en interrogeant les mécanismes qui les lient et en identifiant des principes théoriques génériques quant à leur fonctionnement. Il s’agira de montrer la manière dont les échanges itératifs entre la dimension théorique et empirique de la recherche m’ont menée à la construction d’une démarche interdisciplinaire, tant sur le plan conceptuel que méthodologique. L’approche « intégrée de l’informalité »[i] m’a permis de mettre en cohérence des questions souvent cantonnées à des champs d’études différents. Elle a permis d’étendre aux migrations internes en RPC l’analyse des processus de catégorisation généralement limités au champ des études sur les migrations internationales[ii]. Elle m’a amené à mobiliser des outils d’analyse de portée universelle, souvent utilisés pour analyser les « Suds », dans un contexte urbain « ordinaire »[iii] à Zhuhai, où la politique d’innovation de l’« État développeur »[iv], de portée plus globale, se confronte aux réalités locales.
À la croisée entre la géographie humaine, la géographie urbaine et la sociologie politique, cette recherche prend pour étude de cas la ville de Zhuhai (Guangdong), où une enquête de terrain a été menée pendant 2 ans. Elle combine des outils et des procédés variés relevant de la sociologie et de la géographie, pour traiter des enjeux à la croisée de plusieurs disciplines des études urbaines.
BIBLIOGRAPHIE
[i] Collectif Inverses, Marie Morelle, Sébastien Jacquot, Jérôme Tadié, Nicolas Bautès, Claire Bénit-Gbaffou, Fabrizio Maccaglia, Jean Rivelois, et Alexis Sierra. 2016. « L’informalité politique en ville. 8 chercheurs et 9 villes face aux modes de gouvernement urbain ». L’Espace Politique, no 29 (septembre). https://doi.org/10.4000/espacepolitique.3806. Roy, Ananya. 2005. « Urban Informality: Toward an Epistemology of Planning ». Journal of the American Planning Association 71 (2) : 147‑58. https://doi.org/10.1080/01944360508976689. ———. 2009a. « Strangely Familiar: Planning and the Worlds of Insurgence and Informality ». Planning Theory 8 (1) : 7‑11. https://doi.org/10.1177/1473095208099294. ———. 2009b. « Why India Cannot Plan Its Cities: Informality, Insurgence and the Idiom of Urbanization ». Planning Theory 8 (1) : 76‑87. Yiftachel, Oren. 2009. « Theoretical Notes On `Gray Cities’: the Coming of Urban Apartheid? » Planning Theory 8 (1) : 88‑100.https://doi.org/10.1177/1473095208099300 [ii] Frigoli, Gilles. 2010. « Les usages locaux des catégories de l’action publique face aux situations migratoires ». Migrations Société 128 (2) : 81. https://doi.org/10.3917/migra.128.0081. Martiniello, Marco, et Simon Patrick. 2006. « Les enjeux de la catégorisation : Rapports de domination et luttes autour de la représentation dans les sociétés post-migratoires ». Revue européenne des migrations internationales 21 (2) : 7‑18. https://doi.org/10.4000/remi.2484. [iii] Robinson, Jennifer. 2002. « Global and world cities: a view from off the map ». International Journal of Urban and Regional Research 26 (3) : 531‑54. https://doi.org/10.1111/1468-2427.00397. ———. 2006. Ordinary cities: between modernity and development. Questioning Cities. London ; New York : Routledge [iv] Leftwich, Adrian. 1995. « Bringing politics back in: Towards a model of the developmental state ». Journal of Development Studies 31 (3) : 400‑427. https://doi.org/10.1080/00220389508422370. Székely-Doby, András. 2020. « The Chinese Developmental State: Threats, Challenges, and Prospects ». Issues & Studies 56 (04) : 2050002.Autrice : Marie QUARREY
Mail : Marie.quarrey@hotmail.fr
Statut et affiliation : Doctorante contractuelle
UMR 7363 SAGE, Université de Strasbourg
IRS, Université de Genève
Axe proposé : Axe 1. Circulations spatiales, circulations sociales
Mots clés : travailleurs frontaliers, mobilité, rapport à l’impôt, socialisation à la frontière, optimisation frontalière
A partir d'une enquête d'ethnographie comparée et ethnocomptable portant sur les styles de vie fondés sur la "débrouille" dans différents milieux ruraux, cette communication explorera tant les tactiques mises en place pour réduire les coûts de l’automobile que les ressources non monétaires que nécessite une mobilité non-automobile, et donc sobre, dans des territoires ruraux contraignant à l’automobile. Dans chaque cas, les discours portés par certain-es enquêté-es sur leurs pratiques de mobilité - automobiles ou non - en lien avec les enjeux écologiques seront étudiés.