Par sa teneur, cette communication se veut renouveler les écrits déjà parus sur la mixité sociale. Une analyse uniquement centrée sur les positions sociales et résidentielle des habitants ne suffit pas pour saisir le fonctionnement des résidences issues de la vente HLM. A l'inverse une attention portée à la triple interaction entre position sociale et résidentielle, mode de gestion et histoire des copropriétés est nécessaire.
En Belgique, la Région bruxelloise soutient l’accession à la propriété par des aides publiques destinées aux « classes moyennes », définies en termes de revenus. Cette politique lancée en 1990 vise à l’ancrage de ménages à revenus moyens sur le territoire de la Région de Bruxelles-Capitale, dans une logique de revitalisation urbaine et de renforcement de la mixité sociale dans les quartiers centraux populaires.
Face aux objectifs annoncés, cette étude interroge l'impact de l’acquisition des logements subventionnés sur les trajectoires sociales et résidentielles des ménages concernés, en les comparant à celles de l’ensemble des propriétaires bruxellois. L’analyse s’appuie sur des données administratives individuelles collectées par Statbel, l’office national belge de statistique, pour la période allant de 2001 à 2021.
Les résultats montrent une nette surreprésentation des ménages à revenus élevés parmi les ménages acquéreurs de ces logements subventionnés. Cependant, ce glissement vers le haut de la distribution des revenus ne résulte pas tant d’un effet de sélection à l’entrée de ménages aisés que d’une évolution de leur trajectoire sociale après l’acquisition du logement. Par ailleurs, l’effet d’ancrage se manifeste par une moindre tendance des ménages acquéreurs d’un logement subventionné à quitter la Région bruxelloise que les propriétaires bruxellois. Néanmoins, parmi les acquéreurs d’un logement subventionné qui quittent la ville, les ménages aux revenus élevés sont surreprésentés.
Ces résultats interrogent à la fois sur les publics effectivement touchés par les dispositifs d’aide à l’acquisition résidentielle ciblant les « classes moyennes », ainsi que sur les trajectoires résidentielles différenciées parmi les ménages devenus propriétaires par le biais de ces dispositifs d’action publique.
Bibliographie
Berns, Hannah & Lenel, Emmanuelle & Schaut, Christine & Van Hamme, Gilles. (2022). Pour un changement de paradigme dans la politique d’attractivité résidentielle en Région de Bruxelles-Capitale. Brussels Studies, Collection générale, 172 https://doi.org/10.4000/brussels.6192 (consulté le 15/01/2024).
Bonvalet, Catherine, Bringé, Arnaud. 2013. Les effets de la politique du logement sur l’évolution du taux de propriétaires en France, Revue européenne des sciences sociales, 51-1. https://doi.org/10.4000/ress.2342 (consulté le 15/01/2025).
Clément, Garance, 2021. Se jouer des frontières du marché : stratégies résidentielles des classes moyennes autour de l’agglomération lilloise. Lien social et Politiques, (87), 64–83. https://doi.org/10.7202/1088093ar (consulté le 15/01/25).
Lenel, Emmanuelle, 2013. La mixité sociale dans l’action publique urbaine à Bruxelles. Projet ou langage politique ? Brussels Studies, 65, 25 février 2013. https://doi.org/10.4000/brussels.1129 (consulté le 15/01/2024).
Romainville, Alice, 2010. À qui profitent les politiques d’aide à l’acquisition de logements à Bruxelles ? Brussels Studies, Collection générale, 34. https://doi.org/10.4000/brussels.739 (consulté le 15/01/2024).
Cette communication vise à contribuer à l’étude des rapports entre humains et eau dans le contexte d’une « urbanisation sauvage » (Nadia Khouri-Dagher, 1985) dans un quartier de la ville de Bujumbura (Burundi) soumis aux risques croissant de catastrophes socio-naturelles (Revet, 2007). Écologiquement fragile car positionnée le long du lac Tanganyika et au pied des contreforts, Bujumbura est très exposée aux aléas hydrologiques. Des inondations dues pour l’essentiel à des pluies torrentielles s’y observent de plus en plus fréquemment. De plus, la démographie galopante à l’échelle nationale s’accompagne d’un exode rural et de migrations urbaines vers les périphéries de la ville, conduisant à la prolifération de nouveaux quartiers sur les collines parmi lesquels des quartiers informels non pourvus d’infrastructures adéquates pour le drainage des eaux ménagères et pluvieuses.
La communication interrogera dans une perspective pragmatiste les rapports des habitant·es d’un nouveau quartier informel fortement exposé aux risques d’inondation avec ses matérialités hydrologiques. Elle s’appuiera sur une enquête de terrain en cours (initiée en septembre 2024) dans le quartier Gatunguru traversé par la rivière Gasenyi au Nord de Bujumbura, menée par observations directes aux échelles du logement et du quartier et par entretiens compréhensifs auprès d’une quinzaine d’habitant·es aux positions sociales et aux trajectoires résidentielles hétérogènes. Plus précisément, il s’agira d’une part, d’éclairer les rapports symboliques et pratiques des habitant·es, pris dans cette diversité, à l’eau et aux matérialités en lien avec l’eau, qu’elles soient naturelles (tels que les champs et la rivière) ou construites (tels que les canaux d’évacuation des eaux). La place que ces matérialités occupent dans la composition et la délimitation de leur environnement résidentiel vécu sera notamment questionnée. D’autre part, la communication interrogera la manière dont ces matérialités soutiennent et affectent les relations de voisinage : les alliances et les clivages (Young et Willmott, 2010) qui se forment autour de celles-ci, les pratiques de solidarité qu’elles soutiennent, les affordances (Gibson, 1979) qu’elles offrent aux formes locales de sociabilité.
Enfin, ces analyses soutiendront une réflexion plus théorique sur la relation entre le rural et l’urbain dans le contexte burundais, envisagé dans une perspective de cohabitation et d’hybridation entre des territoires et des sociabilités spécifiques questionnant le modèle classique dichotomique hérité de l’opposition société/communauté (Charmes, 2011).
Bibliographie
Charmes E., 2011, La ville émiettée, essai sur la clubbisation de la vie urbaine, Paris, PUF/Coll. « La ville en débat ».
Gibson J., 1979, The Ecological Approach to Visual Perception, New York, Psychology Press.
Kouri-Dagher N., 1985, « L’urbanisation spontanée autour du Caire : logiques économiques contre logiques politiques et sociale », dans Politiques urbaines dans le monde arabe, MOM Editions.
Revet, S. (2007). Anthropologie d’une catastrophe. Les coulées de boue de 1999 au Vénézuela. Paris : Presse de la Sorbonne Nouvelle.
Young M. et Willmott P., 2010, Le village dans la ville. Famille et parenté dans l'Est londonien, Paris : PUF/coll. « Le lien social ».
A partir d’une enquête menée à Paris auprès d’élu·s, d’agent·s de la Direction de l’urbanisme, de commerçant·s et de riverains, cette communication analyse les conflits d’usage suscités par l’extension des terrasses parisiennes. Elle montre l’omniprésence du registre de l’écologie dans les manières d’argumenter de chacun. Elle s’interroge en outre sur l’effet de ces conflits sociaux, dont la dimension spatiale est décisive, sur les politiques environnementales.
S’appuyant sur une enquête menée auprès de 45 hommes ayant des relations amoureuses ou sexuelles avec d'autres hommes vivant dans des grands ensembles en Île-de-France, cette communication croise sociologie de la sexualité et sociologie urbaine pour analyser comment l’espace, envisagé comme un rapport social, façonne les espaces de rencontres amoureuses et sexuelles. Elle explore la possibilité pour ces hommes de recevoir des partenaires sexuels chez eux. En examinant le lien qu’ils entretiennent avec leur lieu de vie – qu’ils y aient grandi, y aient toujours vécu ou y aient emménagé plus tard dans leur vie – elle montre que recevoir chez soi ou dans son quartier dépend à la fois de leurs pratiques spatiales et de l’espace fantasmé par ces hommes.
Dans la région francilienne, de nombreux indices témoignent de l’intensification des conflits liés aux usages de l’espace, ainsi que de la visibilité croissante des argumentaires et acteurs environnementaux qu’ils impliquent (Charmes et Keil, 2015). Cette conflictualité, particulièrement vive autour d’équipements controversés, devient récurrente dans la construction de logements. On observe alors un paysage complexe de conflits et d’acteurs, caractérisé par des frontières parfois floues entre divers types de mobilisations, incluant des mouvements environnementaux récents et d’envergure nationale, ou plus anciens et territorialement ancrés, ainsi que des associations de riverains mobilisées pour contrôler leurs espaces de vie (Bacqué et al., 2015). Ces dynamiques se déploient dans un contexte où la construction de logements est aux prises avec des injonctions parfois contradictoires de densification et d’adaptation au changement climatique.
À partir du recensement dans la presse locale de 142 cas de mobilisations dans l’aire urbaine parisienne, entre 2017 et 2022, et de leur croisement avec la typologie des IRIS développée par E. Préteceille (1999) à l’échelle de l’Île-de-France, cette communication interroge les liens entre les types de collectifs mobilisés et la composition sociale des territoires concernés. Deux questions structurent l’analyse : comment qualifier, en termes de composition sociale, les territoires de mobilisation contre la construction de logements ? Dans quels contextes socio-spatiaux différents acteurs associatifs se mobilisent-ils, ensemble ou séparément ?
La littérature a souligné la capacité des classes moyennes à développer des formes d’action collective afin de préserver leur cadre de vie urbain face aux enjeux de densification (Bacqué et al., 2015 ; Vermeersch et al., 2019). A l’instar de ces travaux, nous mettrons en exergue l’importance de la composition sociale des espaces et du niveau de mixité sociale pour expliquer la densité des mobilisations contre la construction de logements. Ainsi, ce sont les espaces les plus mixtes parmi les IRIS moyens qui sont les plus conflictuels.
La méthode mobilisée permet d’affiner et de nuancer le rôle des classes moyennes dans le contrôle de la production de logements. Ainsi, au sein des espaces mixtes, on mettra en exergue l’importance spécifique de la présence de classes moyennes supérieures dans l’émergence et la médiatisation des mobilisations contre la construction de logements. Au sein des classes moyennes supérieures, les professionnels du symbolique jouent, en outre, un rôle décisif dans la capacité des collectifs locaux à s’articuler à des acteurs environnementaux opérant à une échelle plus large, et dont les interventions sont concentrées dans le cœur de la métropole. A l’instar des mécanismes documentés dans les beaux quartiers (Pinçon et Pinçon-Charlot, 2007), ils jouent un rôle essentiel dans la « mise en intérêt général » de leurs revendications locales.Les Martiniquais et les Corses qui restent
Appréhender l'immobilité comme moyen d’éclairer les mécanismes en cours dans la sélection au départ
Mots clés : immobilité, émigration, recensement de la population, entretiens semi-directifs, insularité
IntroductionLa question de l’immobilité, ou du choix de rester dans sa région d’origine, tend à être sous-étudiée ou considérée en termes négatifs, en particulier face à une société valorisant le mouvement. Ceux qui demeurent dans leur région d’origine ont longtemps été perçus sous deux angles : d’une part, comme incapables de s’inscrire dans une dynamique de mobilité face à l’injonction croissante au départ des régions insulaires, et d’autre part, comme des individus plus attachés à des éléments de bien-être local – tels que la proximité avec leurs proches ou des aménités environnementales – aux dépens d’ambitions universitaires et professionnelles. Pourtant, questionner les choix d’immobilité peut être un prisme pertinent pour appréhender les logiques de migration (Cooke, 2011). Dans cette perspective, nous nous demandons : dans quelle mesure appréhender l’immobilité permet-elle de rendre compte des mécanismes en cours dans la sélection au départ ? Cette communication propose d’aborder le choix de rester non pas comme une situation passive, mais comme un processus dynamique influencé par les structures sociales et les choix individuels.
MéthodesCe travail se fonde sur un corpus de 20 entretiens semi-directifs menés auprès de 13 Martiniquais et de 7 Corses. Cet échantillon se caractéristique par une diversité d’âge et d’origine sociale.
Caractéristiques sociodémographiques | Effectifs |
Genre | 11 femmes / 9 hommes |
Tranche d'âge | 2 (18-24 ans) 5 (25-34 ans) 2 (35-44 ans) 5 (45-54 ans) 1 (55-65 ans) 5 (65 ans ou plus) |
Origine sociale* *Type d’activité du père, celle de la mère sinon | 4 Agriculteurs exploitants 3 Artisans, commerçants et chefs d’entreprises 7 Employés 4 Ouvriers 2 Professions intermédiaires |
Type d’activité | 14 Actifs 2 Sans activité 4 Retraités |
Cette logique s’oppose au départ des enfants de classes intellectuelles supérieures qui s’orientent vers des filières élitistes et des grandes écoles en Hexagone.
(b) Un capital « administratif » insuffisant ?
Le cas de deux Martiniquais qui ne connaissaient pas les aides à la migration montre dans quelle mesure la difficulté à déchiffrer les étapes administratives est un frein.
(3) L’immobilité comme choix(a) Rester au sein de sa région d’origine n’est une simple affaire de maintien de la proximité avec ses proches. Les perceptions des individus du marché professionnel, en fonction notamment de la situation de leurs proches, importe autant.
(b) Rester au sein de sa région par loyauté régionale et parentale et à cause de la distance ressentie avec l’Hexagone