Comment rendre visible l’habitus, cette « structure structurée » qui fonctionne aussi comme une « structure structurante, c'est-à-dire en tant que principes générateurs et organisateurs de pratiques et de représentations (…) » (Pierre Bourdieu, Le sens pratique, Éditions de Minuit, 1980, p. 88) ? Comment la sociologie visuelle et filmique peut-elle visualiser le fruit de la socialisation et participer à l’analyse du phénomène ? Dans cette communication, nous nous intéresserons en particulier à l’hexis corporelle et donc à la manière dont l’habitus s’inscrit dans les corps, les gestes, l’attitudes, les expressions verbales. Comment travailler l’hexis corporelle par l’image et par le son ? Dans un premier temps, nous analyserons la réponse apportée à cette question par le réalisateur Bertrand Blier pour le seul documentaire de sa carrière, Hitler… connais pas !, sorti en 1963. Blier filme les corps de ses onze entretenus dans le même espace, avec le même dispositif : seul, face aux caméras et à l’équipe, dans un plateau de cinéma totalement vidé pour l’occasion. Par le cadrage, mais surtout par le montage, Blier distingue peu à peu les protagonistes : le « fils de » et son port de tête sûr de lui, à l’opposé de la hiérarchie sociale du visage déjà marqué de la jeune mère, fille d’ouvrier ferroviaire. À travers ce premier exemple, nous souhaiterions interroger les spécificités de l’entretien filmé et la manière dont la perception de l’hexis corporelle modifie profondément le sens des phrases prononcées. Nous mettrons ensuite en perspective cette analyse et ce qu’elle nous apprend sur la visibilisation de l’hexis corporelle en la croisant avec différents exemples plus récents (les films de Thomas Lacoste en particulier, nos propres images d’entretiens filmés). Comment l’entretien filmé est-il un outil audio-visuel, et pas uniquement verbal, de visibilisation de l’invisibilité sociale et de mise en lumière de notions centrales en sociologie ?
Peut-on appréhender le travail domestique comme du care ? Cette communication se propose de traiter cette question à partir de données audiovisuelles collectées dans le cadre d’une enquête de terrain menée auprès de familles. Ainsi, elle montre que les activités domestiques constituent bel et bien un travail de care dans la mesure où elles sont motivées par le souci d’autrui. Ce faisant, sa contribution est double. D’une part, à partir de l’analyse de données de terrain, elle prend position dans le débat académique qui oppose travail domestique d’un côté, et care de l’autre. D’autre part, elle souhaite prolonger les recherches audiovisuelles sur le travail domestique tout en apportant, plus particulièrement, des éléments de réflexion concernant les freins à la pratique de la délégation des activités familiales.