Depuis le milieu des années 2010, des organisations militantes françaises ont créé divers espaces en ligne et hors ligne où les victimes de harcèlement de rue peuvent partager leurs expériences. Une question a soulevé de nombreuses controverses parmi les militant.e.s : comment traiter les personnes qui partagent des expériences liant le harcèlement de rue aux hommes racisés ? La communication s’appuie sur la recherche sociologique sur le « storytelling » dans les mouvements sociaux (Polletta et al. 2011 ; Fileborn 2016) en analysant le processus de négociation sur ce qui constitue un « bon » récit de harcèlement de rue. De nombreuses personnes ont structuré leurs récits non seulement en fonction de ce qu’elles voulaient partager, mais aussi de leur volonté d’éviter les effets négatifs auxquels leurs témoignages pourraient donner lieu (par exemple, éviter que ces derniers soient repris en vue de développer un discours xénophobe). Sur la base d’une analyse de 532 expériences partagées sur différentes plateformes, d’observations ethnographiques et d’entretiens, j’analyse comment l’« appréhension » (Dekker 2022) de stigmatiser des hommes racisés a façonné les récits des victimes de harcèlement.