La modernité politique, et en particulier ses aspects environnementaux, est productrice d’inégalités, qui n’ont pas toujours été bien prises en compte par les études sociologiques. Face aux constats alarmants sur le dérèglement climatique, l’effondrement de la biodiversité et leurs répercussions sur l’ensemble des sociétés, le RT 45 Sociologie du Conflit a choisi pour thématiques de ses tables rondes de se pencher sur la manière dont les inégalités liées aux changements de condition environnementale, au sens large, modifient le rapport au politique et à la conflictualité. Notre appel à communication invite chercheurs et praticiens à soumettre leur proposition afin de traiter des liens entre environnement(s) et nouvelles conflictualités, que celles-ci soient internationales ou domestiques. Les communications exploreront au choix le rapport entre nouvelles formes de contestation et de mobilisation face aux évolutions climatiques, les nouvelles formes de militantisme en lien avec l’écologie politique et les inégalités spécifiques qu’elles dénoncent, ou bien l’influence consécutive des changements environnementaux sur les régimes politiques devant prendre en charge les nouvelles formes de contestation, c’est-à-dire toute étude consacrée aux formes émergentes de violence et de conflit structurel créé par les changements environnementaux. Nous cherchons à comprendre comment ces différentes acceptions du terme « environnement » interagissent avec les dynamiques d’inégalités, tant au niveau théorique qu’à travers les enquêtes empiriques, afin d’éclairer les divers types de réponse aux crises sociales et environnementales continues qui caractérisent nos sociétés contemporaines.

Cet appel à communication est ouvert et ne saurait se limiter aux axes présentés dans cet appel, qui ont pour but de permettre une première approche de la question et de guider les réflexions des contributeurs.

1) Confits internationaux et crise climatique

L’interaction entre conflits internationaux et crise climatique est un enjeu fondamental pour la sociologie des conflits. La raréfaction des ressources, les déplacements de populations en lien avec les changements climatiques, la déstabilisation des écosystèmes soulèvent des enjeux sociaux complexes. Ils constituent des facteurs majeurs de déstabilisation des sociétés et de conflits entre groupes sociaux. Cette thématique « conflits internationaux et crise climatique » du RT 45 Sociologie du conflit invite les chercheurs en sociologie et ceux issus de différents horizons disciplinaires à présenter des travaux de recherche innovants sur les liens qui unissent ces deux concepts, conflit international et crise climatique, pour explorer la manière dont ils s’alimentent mutuellement. Au-delà de l’articulation et de la compréhension de ces deux concepts (axe 1), il s’agira également d’explorer les solutions durables qui sont aujourd’hui envisagées par les États, les OIG et les ONG, plus largement la société civile, pour répondre à ces enjeux climatiques et aux crises et conflits internationaux qui y sont liés.

2) Changement dans l’environnement professionnel et conflits sociaux

La révolution numérique et la crise du Covid ont entraîné une transformation des environnements de travail. Elles ont eu des effets très différents sur les environnements professionnels. Le développement des technologies numériques, en particulier l’IA, ont entraîné des changements dans les pratiques professionnelles, une précarisation de l’emploi voire présage la disparition progressive de certains métiers synonyme de crise pour certains secteurs d’activité. De son côté, la pandémie de Covid a entraîné une crise du sens qui s’est traduite par la remise en question du sens que les individus donnaient jusque-là à leur travail, et par la généralisation de pratiques telles que le télétravail. Dans tous les cas de figure, ces changements dans les environnements professionnels se sont traduits par l’évolution ou l’émergence de normes qui ont entraîné des conflits sociaux. Cet appel à proposition cherche à comprendre ces dynamiques et leurs répercussions sur les relations de travail et les revendications sociales, sur les mobilisations sociales, les luttes et conflits sociaux. Les propositions pourront se concentrer sur les axes suivants : l’impact de la crise sanitaire liée au Covid sur l’environnement professionnel, le développement de nouvelles technologies et ses conséquences sur les conditions de travail, les mutations des rapports de pouvoir dans l’entreprise, et les nouvelles formes de mobilisation et d’action collective dans ce contexte de changement.

3) Conflits, changement climatique et régimes politiques

Les effets du changement climatique influencent profondément les régimes politiques et les dynamiques de pouvoir. Cette thématique du RT « sociologie du conflit » propose d’explorer les interactions entre changement climatique, conflits sociaux, et transformations des régimes politiques. Les propositions des chercheurs pourront s’articuler autour de trois axes : tout d’abord, l’influence des changements climatiques sur les régimes politiques : Quelles sont les conséquences des phénomènes climatiques extrêmes et la gestion des ressources sur la stabilité des régimes politiques ? Quels sont les réformes et les bouleversements politiques auxquels ils conduisent ? Ensuite, il s’agit d’aborder l’appropriation des enjeux climatiques par les partis politiques : Comment les partis au pouvoir ou en quête de pouvoir se mobilisent-ils autour de la question climatique ? Quels conflits politiques et sociaux émergent de ces stratégies, et comment les rivalités pour le contrôle des ressources environnementales et énergétiques modifient-elles les équilibres de pouvoir ? Enfin, les propositions qui abordent la question de la gestion des conflits environnementaux et des inégalités sociales seront également les bienvenues : quelles stratégies de justification les gouvernements utilisent-ils pour gérer les conflits sociaux liés à l’environnement (environnement matériel, spatial, politique, etc.) ? Comment les modes de gouvernance, parfois illibéraux, produisent-ils de nouvelles inégalités et potentiellement de nouveaux modèles politiques face à la crise climatique ?

4) Environnement, mobilisations, conflit et nouvelles formes de violence

Dans un contexte de crises multiples, les nouvelles formes de mobilisation et de militantisme redéfinissent les rapports au conflit et à la violence. Cette thématique de la RT « sociologie du conflit » propose d’analyser la manière dont les mobilisations actuelles, souvent marquées par de nouvelles formes de violence, nous invitent à ré interroger les théories du conflit. Les propositions pourront s’articuler autour de trois axes : tout d’abord les nouvelles formes de mobilisation et rapports à la violence : dans un environnement de plus en plus miné par les crises, comment les mouvements militants, qu’ils soient écologiques, sociaux ou politiques, redéfinissent-ils leurs stratégies en lien avec la violence (violences policières, radicalisation, cyberviolence, etc.) ? Comment ces mobilisations s’inscrivent-elles dans les espaces démocratiques et contestent-elles les modes d’action traditionnels ? Ensuite, il s’agira de s’intéresser plus spécifiquement aux travaux en sociologie qui analysent les différentes formes de militantisme : quels sont les principaux qui analysent les nouvelles formes de militantisme ? Que nous apprennent-ils sur ces nouvelles formes de militantisme et leurs rapports avec les violences ? Comment les sociologues du conflit interprètent-ils ces mobilisations qui se déroulent dans des contextes de crise politique et de polarisation croissante ? Enfin, il sera question d’interroger les nouvelles formes de mobilisation et d’action politique, en particulier les formes de conflictualité telles que les violences policières, les attentats terroristes, au travers du prisme des sociologies du conflit. Comment ces formes de mobilisation et d’action invitent-elles les sociologues qui réfléchissent sur les dynamiques de pouvoir, de résistance, et de violence à renouveler ou à ajuster leurs cadres théoriques voire les fondements épistémologiques de leurs travaux ?