RT43

Appel à communication RT 43 Sociologie & Religions - Congrès de Lyon

Dans le cadre de la thématique générale du congrès de l’AFS « intersections, circulations », le réseau thématique « sociologie et religions » invite les participant·e·s à réfléchir à l’articulation entre les religions – appréhendées dans leurs dimensions individuelle, familiale et/ou institutionnelle – et les circulations – des personnes, des biens, des idées et des savoirs. Il s’agira d’analyser les conséquences de ces circulations en termes de pratiques et de croyances religieuses, d’organisation ecclésiale et de sentiments d’appartenance (locale, nationale ou culturelle etc.) et d’étudier comment les religions peuvent donner un sens à ces circulations et parfois les initier (comme dans le cas des pèlerinages, des processions et plus largement du tourisme religieux, ou des activités missionnaires et des migrations des étudiants en théologie). Quatre axes de réflexion sont proposés.   Migrations géographiques et mobilités religieuses L’analyse des religions et des migrations – en particulier internationales – a fait l’objet de nombreux travaux historiques, anthropologiques et sociologiques. Les cadres théoriques des recherches, notamment anthropologiques, sur les migrations internationales sont passés depuis une vingtaine d’années d’une « approche assimilationniste des flux migratoires à une approche mettant en lumière les processus transnationaux » (Capone, 2010). L’accent s’est porté sur les transmissions religieuses au sein de familles dispersées géographiquement, le maintien des liens au-delà des frontières nationales (Braud, 2017), les processus de déterritorialisation et de reterritorialisation, ainsi que sur les stratégies d’encadrement des organisations religieuses et de redéfinitions des modes de légitimité des autorités religieuses. En sociologie, les travaux de Danièle Hervieu-Léger sur la religion en mouvement (Hervieu-Léger, 1999) ont montré, à partir des figures idéal-typiques du pèlerin et du converti, l’intérêt heuristique de penser ensemble mobilités géographiques et religieuses. Cet appel à communication vise à poursuivre ces réflexions, en revisitant, à partir d’enquêtes empiriques détaillées, les notions théoriques de syncrétisme, d’hybridité, d’appartenances plurielles ou en alternance, de « butinage » (Soares, 2009) ou de bricolage et d’exotisme religieux (Altglas, 2014). Il conviendra aussi de s’interroger sur les enjeux épistémologiques et les difficultés méthodologiques des enquêtes de terrain intégrant les migrations des personnes –comme les enquêtes multi-situées ou les monographies familiales – et plus largement les circulations d’informations et de savoirs diffusés sur les réseaux sociaux et les sites internet en précisant les choix d’échelles d’analyse spatiales (locale, nationale etc.) et temporelles effectués et les méthodes mobilisées.   Socialisations multiples et imbrication des rapports sociaux Au-delà des migrations géographiques et des mobilités religieuses, il s’agira à travers l’analyse des circulations des personnes entre différentes sphères de la vie sociale de réinscrire les trajectoires et expériences religieuses, dans le cadre plus large de socialisations multiples, (familiale, professionnelle, politique etc. ). Cette approche permettra d’interroger les possibles réinvestissements dans la sphère religieuse de savoirs et compétences acquis précédemment et d’étudier comment  des aptitudes, de savoirs ou de croyances forgées dans des espaces religieux peuvent être mobilisés dans d’autres milieux, notamment professionnels ou militants (Fretel, 2004 ; Siméant 2009). En réinscrivant le religieux dans son contexte social l’objectif est, plus largement, d’aborder la religion comme un lieu de socialisation, de pouvoir et d’incorporation de normes marquées par l’imbrication des rapports sociaux, notamment en termes de genre, classe et race. Au sein des espaces religieux eux-mêmes, les socialisations multiples et le jeu des dispositions ou capitaux personnels peuvent avoir des effets déterminants sur les rapports de pouvoir. L’engagement simultané dans plusieurs lieux peut ainsi encourager « un comparatisme ordinaire » (Vidal, 2012) et une mise à distance de l’autorité institutionnelle. Il peut aussi s’inscrire dans des configurations où la référence à des autorités multiples structure des pratiques et des expériences en affinité avec des positions sociales « intermédiaires », qui favorisent un rapport ambivalent à l’autorité (Wood, 2021). Poser la question des apports de la sociologie des religions aux théories intersectionnelles invite dès lors à réintroduire également la question du pouvoir dans l’analyse du religieux (Beckford, 1983).   Religions et territoires partagés En nous intéressant plus particulièrement à la dimension territoriale des circulations et aux effets de cohabitation, de ségrégation spatiale ou de distinction sociale que ces circulations sont susceptibles de produire, l’objectif est de croiser des approches de sociologie (ou de géographie) des religions et de sociologie des territoires et des politiques locales en portant une attention particulière à l’échelle locale. Il s’agira d’analyser l’inscription territoriale du religieux résultant de ces circulations, et d’observer comment les lieux de culte, les célébrations publiques ou d’autres manifestations contribuent à produire et définir l’espace, mais aussi comment celui-ci contribue à changer ou modifier les expressions religieuses (Endelstein et al., 2010 ; Becci et al., 2013). Les lieux de culte partagés ou les lieux de pèlerinage qui accueillent, indistinctement ou successivement, pèlerins et touristes constituent des lieux d’observation privilégiés des processus d’appropriation des lieux, d’adaptation et de négociation des comportements et pratiques. On pourra aussi analyser, dans cette perspective, les réinterprétations discursives, les adaptations rituelles ou matérielles que les circulations peuvent produire en référence à des territoires : patrimonialisation du religieux, nostalgie ou discours politico-religieux sur les « racines », préoccupations environnementales et sacralisation de la nature, etc. Il s’agira enfin de prêter une attention particulière à la pluralité religieuse et culturelle, intrinsèquement liée aux circulations des personnes et des idées, en étudiant les modes de catégorisation et de régulation de ce pluralisme religieux au niveau des institutions religieuses, des municipalités ou des entreprises.   La transformation du métier de sociologue des religions Cette attention portée aux circulations et aux intersections entre le religieux et le social conduit inévitablement à réfléchir aussi, de manière plus transversale, aux conditions d’exercice du métier de sociologue des religions. La contractualisation de la recherche et la place croissante des religions dans le débat public tendent en effet à amplifier les interrogations sur les conditions de l’autonomie de l’activité scientifique, inhérentes à une discipline comme la sociologie, par définition partie prenante de la production d’une vision légitime du monde social (Bourdieu, 2001 : 170). On pourra donc s’intéresser aux transferts de savoirs et de compétences entre sphère scientifique et sphère publique lors de la construction de la ou des religions(s) comme objet d’étude et de l’expertise (Marzouki, 2008), aux conditions et aux effets des circulations des savoirs sociologiques et de leurs réappropriations en dehors des milieux académiques, en analysant notamment les intersections entre le métier de sociologue et la fonction d’expert (Bérard et Crespin, 2010). Envoi des propositions de communication Les propositions de communication, d'une demi-page à une page, doivent indiquer : nom et prénom du ou des auteur·e·s ; affiliation institutionnelle ; adresse email. Ces propositions sont à déposer sur le site de l’AFS selon les modalités communes à tous les réseaux thématiques, avant la date limite fixée au 31 janvier 2023. La décision sera communiquée aux auteur·e·s fin février 2023.     Bibliographique Véronique Altglas, 2014. « Exotisme religieux et bricolage », Archives de sciences sociales des religions, n°167, pp. 315-332. Irene Becci, Marian Burchardt & José Casanova (eds.), 2013. Topographies of faith. Religion in Urban Spaces, Leiden, Brill. James A. Beckford, 1983. « The Restoration of “Power” to the Sociology of Religion », Sociological Analysis 44(1), pp. 11-32. Yann Bérard et Renaud Crespin (eds.), 2010. Aux frontières de l’expertise : dialogues entre savoirs et pouvoirs, Rennes, Presses universitaires de Rennes, pp. 177-195. Pierre Bourdieu, 2001. Science de la science et réflexivité, Paris, Raisons d’agir. Valentin Braud, 2017. « Entre passé et présent, entre migration et exil : les Espagnols et leurs descendants au Venezuela », Conserveries mémorielles, n°20, http://journals.openedition.org/cm/2567 Stefania Capone, 2010. « Religions en migrations : de l’étude des migrations internationales à l’approche transnationale », Revue Autrepart, n°56, pp. 235-259. Lucine Endelstein; Sébastien Fath & Séverine Mathieu (eds.), 2010. Dieu change en ville. Paris, L’Harmattan. Julien Fretel, 2004. « Quand les catholiques vont au parti », Actes de la recherche en sciences sociales, n°155, pp. 76-89. Danièle Hervieu-Léger, 1999. Le pèlerin et le converti, la religion en mouvement, Paris Flammarion. Nadia Marzouki, 2008. « L’Islam introuvable, la construction de l’islam par les sciences sociales et l’expertise publique en France et aux États-Unis », thèse de doctorat en science politique, Institut d’études politiques de Paris. Johanna Siméant, 2009. « Socialisation catholique et biens de salut dans quatre ONG humanitaires françaises », Le Mouvement social, vol. 227, pp. 101-122. Edio Soares, 2009. Le butinage religieux. Pratiques et pratiquants au Brésil, Paris, Karthala. Dominique Vidal, 2012. « Comparer le comparatisme ordinaire. À propos des migrants mozambicains à Johannesburg et boliviens à São Paulo », Terrains & Travaux n°21, pp. 55-73. Mathew Wood, 2021. Spiritualité et pouvoir. Les ambiguïtés de l’autorité religieuse, Genève, Labor et Fides.












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