Appel à communication du Réseau Thématique « Sociologie du droit et de la justice » (RT 13) – Congrès AFS 2021

Appel à communication du Réseau Thématique « Sociologie du droit et de la justice » (RT 13) – Congrès AFS 2021

Le réseau thématique « Sociologie du droit et de la justice » (RT13) de l’Association Française de Sociologie a pour vocation de réunir les chercheur·se·s et doctorant·e·s travaillant sur le droit ou la justice avec les méthodes et les questionnements des sciences sociales. Le RT13 met en relation des travaux fondés sur des bases empiriques solides, sans exclusivité de méthode, ni de courant d’analyse. Au-delà des chercheur·se·s prenant directement pour objets les institutions, les normes, les acteur·ices et les dispositifs juridiques et judiciaires, le réseau est ouvert à celles et ceux qui sont amené·e·s à travailler sur le droit et/ou la justice à travers d’autres objets (organisations, action publique, mobilisations ou professions, pour ne citer que quelques exemples). Il est également attentif à travailler ses objets privilégiés à partir des outils analytiques transversaux aux sciences sociales.

Dans les discours publics, il n’est pas rare de percevoir le droit tantôt comme un vecteur de progrès social, tantôt à l’inverse comme une institution intrinsèquement conservatrice. Traiter de cette question en sociologues amène à se demander, si inversement, le changement social entraîne des transformations du droit, voire à envisager la co-construction du changement social et du changement juridique. Dans quelle mesure et à quelles conditions le droit anticipe-t-il, produit-il ou, au contraire, suit-il les transformations de la société ? Le congrès 2021 de l’AFS nous invite à renouveler notre regard sur ces questions, qui irriguent le monde universitaire, mais aussi les mouvements sociaux et les institutions publiques. Les sessions organisées par le RT13 inviteront leurs participant·e·s à revisiter des questions qui structurent de longue date la sociologie du droit tout autant qu’à ouvrir de nouvelles perspectives à l’aune des transformations sociales et juridiques contemporaines. Les propositions de communications pourront s’inscrire dans l’un des trois axes suivants.

1) Le droit : moteur ou obstacle au changement social ?

Le Congrès sera d’abord l’occasion de revisiter un débat classique des sciences sociales qui vise à déterminer les conditions dans lesquelles le droit cesse d’être un facteur d’inertie et de reproduction de l’ordre social pour devenir un instrument au service du changement social. Les mouvements sociaux ont recours au droit pour défendre leurs causes, par exemple en formulant leurs revendications en termes de droits ou en contestant des pratiques étatiques ou privées devant la justice. Mais l’efficacité de « l’arme du droit » varie. Elle dépend d’abord de facteurs propres aux institutions, qui vont des trajectoires sociales des juges à l’organisation interne des bureaucraties chargées de rendre effectifs les droits nouvellement acquis, elles-mêmes marquées par des processus d’inertie et de changement. La structuration des mouvements sociaux doit aussi être considérée, tant sous l’angle des alliances tissées avec des professionnel·le·s du droit que des altérations plus ou moins grandes des mots d’ordre afin de les rendre solubles dans les catégories juridiques. Les débats actuels sur la réponse à apporter aux violences sexuelles, aux violences policières ou encore aux atteintes à l’environnement, montrent à quel point ces enjeux sont d’actualité. Inversement, les mouvements sociaux sont aussi “saisis par le droit”, au sens où leur encadrement juridique par les pouvoirs publics pèse sur leur capacité à faire émerger des causes, à faire avancer leurs revendications et à bousculer l’ordre établi. La place du droit et des institutions juridictionnelles dans la période de restriction des libertés publiques que nous traversons pose ainsi question aux sociologues que nous sommes.

 

Session croisée RT13/RT18 (sociologie des relations professionnelles) 

Pratiques syndicales et usages du droit au regard des transformations récentes du Code du travail

Les changements sociaux dont il est ici question peuvent se lire à l’aune des nombreuses évolutions législatives intervenues ces dernières années dans le droit du travail, avec notamment la loi du 8 août 2016 et les ordonnances du 22 septembre 2017. Ces réformes ont concerné des domaines très variés, affectant les règles des négociations collectives, le recours aux prud’hommes, les licenciements collectifs, etc. La principale tendance de ces nouvelles lois est de faire des accords d’entreprise l’outil privilégié de la régulation des relations de travail comme en témoigne la nouvelle organisation du code du Travail dans lequel les dispositions prévues par la loi ne disparaissent pas, mais deviennent supplétives, c’est-à-dire ne s’appliquent qu’en l’absence d’un accord d’entreprise. En parallèle, les différentes instances de représentation du personnel (délégué·e·s du personnel, comité d’hygiène et sécurité et des conditions de travail, comité d’entreprise) ont disparu au profit d’une instance unique, le comité économique et social (CSE). Comment les acteurs·rices – représentant·e·s de direction, du personnel, délégué·e·s syndicaux, salarié·e·s – se saisissent de ces nouveaux dispositifs ? En quoi la multiplication des nouveaux textes législatifs encourage-t-elle certaines formes de judiciarisation – ou au moins de juridicisation – des relations professionnelles ? Assiste-t-on à des pratiques d’« endogénéisation du droit » très diversifiées ou, au contraire, similaires selon les entreprises ? Dans quelle mesure les activités syndicales sont-elles affectées par la disparition des anciennes instances de représentation du personnel et l’arrivée des CSE ? En partenariat avec le RT 18 « sociologie des relations professionnelles », cette session cherche à étudier les usages du droit des syndicats, des employeurs et des salariés au regard des récentes évolutions du Code du travail.

2) Changement juridique et transformations individuelles

La question du droit et du changement social peut également être abordée dans une perspective plus microsociologique, attentive à leur place dans les transitions biographiques, individuelles et collectives. Cet axe réunira des recherches qui interrogent le point de vue des citoyennes et des citoyens qui ont affaire au droit et à la justice dans les moments critiques de leur vie personnelle ou professionnelle. Former ou rompre une union conjugale, devenir parent ou organiser sa succession, chercher ou perdre un emploi ou un logement, s’installer dans un nouveau pays, sont autant d’occasions de se saisir (ou non) du droit pour définir son identité, avoir accès à des ressources, organiser ses relations sociales. Par la nécessité de justifier les déplacements individuels, de limiter les regroupements collectifs ou encore de porter le masque, la gestion de la pandémie actuelle exacerbe également la question du droit et des droits dans la vie quotidienne. Ces expériences profanes du droit sont une des logiques qui guident les actions, les valeurs et les intérêts des individus et des groupes; elles dépendent des dispositions sociales, économiques et culturelles ainsi que des configurations matérielles et institutionnelles du droit. Par ailleurs, la formalisation juridique de nouveaux droits, les réformes législatives instituant de nouvelles procédures ou de nouveaux instruments juridiques peuvent permettre de faire valoir certains droits, à des victimes d’ester en justice ou de demander des réparations. On peut dès lors s’interroger sur les effets de ces transformations juridiques sur les personnes qu’elles concernent directement, sur leurs rapports au(x) droit(s) ou leur conscience du droit et de leurs droits. De même que certaines recherches interrogent le sentiment de justice, le sens social et politique des sanctions pénales, ainsi que l’expérience des rituels et des interactions judiciaires par les justiciables, cet axe est donc ouvert aux propositions qui étudieront ce que tout·e un·e chacun·e, en fonction de sa place dans l’ordre social, fait avec ces règles inédites, entre conformation, évitement et contestation.

3) Droit, justice et sociologie du droit en changement

Enfin, ces sessions du RT13 entendent être particulièrement ouvertes aux jeunes chercheurs et chercheuses. Plusieurs raisons à cela : d’abord, les journées doctorales du réseau n’ont pu avoir lieu en mars 2020, alors même que la jeune génération joue un rôle majeur pour renouveler la sociologie du droit – dans ses méthodes, dans ses objets comme dans ses cadres d’analyse. Ensuite, le contexte pandémique affecte particulièrement les jeunes chercheuses et chercheurs, compliquant les enquêtes de terrain dont le temps est pourtant compté au regard du format actuel des thèses. Cet axe appelle des propositions réflexives pour faire face à la déstabilisation induite par la crise dans le déroulement des recherches. Il invite aussi à penser les enjeux éventuellement spécifiques des terrains juridiques et judiciaires dans le contexte pandémique : dans quelle mesure l’épisode du confinement a-t-il ouvert une fenêtre d’opportunité pour transformer l’organisation du travail dans les juridictions, pour accélérer la “digitalisation” de la justice, pour déjudiciariser certains contentieux ou encore pour faire émerger de nouvelles normes – par exemple en matière de télétravail ? Cette liste non exhaustive de pistes de recherche témoigne de l’ouverture du réseau aux questions qui se posent ici et maintenant aux sociologues du droit et de la justice.

Les propositions de communications ne devront pas excéder 5 000 signes. Elles comporteront un titre, la question de recherche, les principaux arguments ou la thèse démontrée, les principaux résultats, les méthodes mobilisées, sources et terrains étudiés, le cadre théorique dans lequel elles s’inscrivent, ainsi qu’une bibliographie sommaire. Elles devront, le cas échéant, préciser si elles sont destinées à la session croisée organisée par les RT13 et RT18.

Elles devront obligatoirement être mises en ligne sur le site de l’AFS (https://afs-socio.fr/) avant le 30 janvier 2021

Calendrier

30 Janvier 2021 : réception des propositions de communication sur la plateforme du RT13

Mi-mars 2021 : réponse du RT13

Début juin 2021 : envoi aux discutant·es et aux responsables du RT13 du support de la communication, d’une longueur de 10 à 15 pages

6-9 juillet 2021 : congrès de l’AFS













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