RT5

AAC RT5 Congrès AFS Lyon 2023

10ème Congrès de l’AFS « Intersections, circulations » Du 4 au 7 juillet 2021 Lyon  
  Appel à communications Réseau Thématique 5 « Classes sociales, inégalités, fragmentations »   Dans le cadre du thème général « Intersections, circulations » du congrès 2023 de l’AFS à Lyon, le bureau du RT5 souhaite susciter des propositions de communication selon quatre axes de réflexion, étant entendu que cet appel à communication demeure large et ouvert aux travaux qui rencontrent plus généralement les préoccupations du RT 5.   Axe 1 - Interactions et rapports sociaux   Un premier axe interroge la manière dont les frontières entre groupes sociaux sont modifiées, ré-affirmées, renforcées ou contournées au cours d’interactions concrètes. La recherche classique de Norbert Elias et John Scotson (Elias, Muel-Dreyfus, 1985) invitait à articuler l’analyse de la production des frontières de classe et le processus de racialisation à partir des interactions entre groupes définis selon leur ancienneté de résidence. Plusieurs recherches ethnographiques ont, depuis, montré l’importance d’étudier la manière dont les lignes de clivage des sociétés contemporaines s’incarnent et se rejouent lors d’interactions concrètes, au croisement de la classe, de la race, mais aussi du genre. La prise en compte de cette échelle interactionnelle permet d’étudier comment les déterminants structurels s’imbriquent (Mazouz, 2020). Elsa Favier montre ainsi que les femmes énarques issues des classes supérieures adoptent de nouvelles normes de féminité, au cours de stages en ambassade ou en préfecture où elles se confrontent à leurs homologues masculins, afin de se maintenir dans cet univers professionnel (Favier, 2021). L’analyse des inflexions que l’espace local introduit pourra également être prise en compte (Bruneau et al., 2018). Par exemple, Kevin Geay, questionnant les manières dont les résidents du 16ème arrondissement et les prostituées du Bois de Boulogne se partagent l’espace public, donne à voir des rapports de domination imbriqués qui concourent à la différenciation sociale des secondes (Geay, 2015). Cet axe invite donc à interroger ce que les interactions et les confrontations sociales (Menoux, 2016) font à la construction des dispositions, des positions sociales – entre mobilité sociale et reproduction – et aux styles de vie. Les terrains étudiés pourront être divers – le voisinage, la sphère professionnelle, les scènes associatives, la vie conjugale, l’administration, etc. – et croiser différentes échelles d’analyse. Axe 2 : Circulation des capitaux entre différentes sphères d’activité   Dans le prolongement des travaux de Pierre Bourdieu sur la (re)conversion des différentes espèces de capital (Bourdieu, 1979), une partie des communications pourra porter sur l’analyse des conditions de possibilité, des conséquences ainsi que des modalités concrètes de circulations des capitaux entre différents domaines d’activité. Quels processus permettent le transfert ou la conversion d’un type de capital propre à une sphère d’activité ou à un champ, vers un.e autre ? Quels sont les effets de ces circulations de capitaux sur ces différent.e.s sphères/champs : modification des rapports de force, déclassement ou valorisation de groupes, transformation des activités, réorientation des enjeux du champ ? Comment (sous quelles formes et sous quelles conditions) les individus, les institutions, les classes ou les fractions de classes sont-ils partie prenante de ces circulations ? Pour étudier ces questionnements, nous invitons les communiquant.e.s à être attentif.ve.s aux dimensions temporelles et spatiales de la circulation des capitaux, qui peuvent influer sur le taux de change ainsi que sur la rentabilité des stratégies de reconversion (Guéraut, 2018). Ainsi par exemple, une propriété foncière peut devenir un capital économique rentable à la suite d’une migration spatiale vers un territoire pauvre, où l’accès à la terre est facilité, et devenir la base d’un enrichissement social important après plusieurs générations (Laferté, 2018). Les communications pourront également faire varier les échelles d’analyse. À l’échelle individuelle, les capitaux en possession d’un agent peuvent voir leur valeur changer lorsqu’il circule d’une sphère d’activité à une autre, comme le montre le cas des compétences interactionnelles dans le secteur immobilier (Bernard, 2016). À l’échelle d’un groupe social, l’accumulation d’un type de capital par un groupe donné peut également conduire à sa dévaluation ou à sa revalorisation. À l’échelle d’un champ, la circulation des capitaux peut conduire à la modification de sa structure et, partant, des stratégies et des luttes entre les agents en son sein, comme dans le cas du capital économique dans le champ scolaire (Bourdieu, 1989). Enfin, les communications pourront interroger les effets de ces circulations de capitaux sur les rapports entre groupes sociaux : en lien avec la notion d’intersection, on pourra alors interroger, en particulier, en quoi le cumul ou la configuration particulière de différents types de capitaux permet de caractériser plus précisément une grande variété de fractions de classe. Au-delà de la simple mention des capitaux travaillés, nous invitons les communications à définir précisément les différents types de capitaux traités par l’analyse, en particulier la forme des capitaux concernés, leur état, leur composition, tout en veillant aux usages incontrôlés de la notion (Neveu, 2013). Plusieurs travaux ont par exemple montré comment, selon les modalités de son accumulation, le capital culturel pouvait prendre des formes particulièrement variées (plus ou moins proches de la forme scolaire), et donc des valeurs très différentes selon les champs où il circule (Serre, 2012 ; Sinthon, 2018). Les capitaux pourront aussi être étudiés sous des formes encore peu objectivées mais montrant la logique d'accumulation qui les sous-tend (Rupp, 1995).   Axe 3 : Espaces de circulations, positions et mobilités sociales Un troisième axe invite à approfondir l’effet des circulations, par exemple entre espaces locaux, nationaux et transnationaux, sur la construction des rapports sociaux. Plusieurs recherches récentes encouragent à dé-nationaliser l’analyse des classes sociales (Wimmer, Glick Schiller, 2003 ; Bidet, 2018 ; Bréant et al., 2018 ; Hugrée, Pénissat, Spire, 2017). À ce titre, elles invitent à observer plus finement la complexité de la trajectoire migratoire pour saisir ses effets, en termes d’insertion économique des immigrés par exemple (Caron, 2022). D’autres travaux sont attentifs aux incidences des circulations infranationales sur les appartenances de classe, de genre, de race et sur les styles de vie adoptés. La réversibilité des mobilités résidentielles entreprises de la part de jeunes femmes originaires d’espaces ruraux et de villes petites et moyennes est révélatrice de leur déficit de ressources sociales et des « rappels aux origines » vécus (Guéraut, Jedlicki, Noûs, 2021). À partir de terrains situés dans différents contextes géographiques, les communicant.es pourront ainsi consolider l’articulation entre la sociologie des classes sociales, des migrations et de l’immigration. Mais on observe également que les circulations entre des espaces institutionnels différents ont des incidences sur les positions et les rôles sociaux investis. C’est le cas de l’incarcération qui entame les relations familiales et professionnelles et réactive des dispositions anciennes, par exemple religieuses, ce qui permet de gérer l’expérience contraignante de la prison (Ducloux, 2021). Des recherches récentes ont par ailleurs montré l’intérêt qu’il y a à appréhender des déplacements dans un espace social du genre (Beaubatie, 2021) ou de la race (Genèses, 2019) comme des mobilités sociales. Quels effets en termes de reclassement ou de déclassement ces circulations entre des espaces sociaux variés produisent-elles sur les trajectoires ? Ces travaux n’invitent-ils pas à questionner les enseignements d’une sociologie de la mobilité sociale trop attachée aux indicateurs “classiques” de la position sociale ? Les communications pourront ainsi questionner les espaces de circulation au prisme de l’imbrication des différents rapports sociaux (race, classe, genre, génération). Axe 4 - Saisir la crise sanitaire “par le bas”   Le quatrième axe propose d’interroger les effets de la crise sanitaire sur les classes populaires. Plusieurs enquêtes quantitatives montrent que la pandémie et les confinements ont amplifié les inégalités de santé (Bajos, et al., 2022), de logement (Lambert et Cayouette-Remblière, 2021) ou dans les rapports aux institutions (Mariot, Mercklé et Perdoncin, 2021). Pour ce congrès, nous invitons à préciser ces constats généraux en suscitant des communications qui analysent les vécus différenciés de la crise sanitaire au sein des classes populaires à partir d’enquêtes de terrain localisées. Ce faisant, il s’agit de réinterroger une question présente depuis les travaux de K. Marx (1850) et réactualisée par O. Schwartz (2011) : celle de la fragmentation des classes dominées et des effets que produisent les politiques sanitaires (Fassin, 2022) sur les divisions au sein de ces groupes, mais aussi sur les recompositions de leurs cultures somatiques (Boltanski, 1971). Les communications pourront porter sur l’exacerbation des antagonismes et/ou la constitution d’alliances de classes par temps de pandémie. Certaines populations, notamment les classes populaires racisées vivant en banlieue, ont fait l’objet d’une répression accrue pendant la crise (Gilbert, 2020). Les ambiguïtés des politiques de contrôle ont aussi accentué les tensions au sein des métiers de l’ordre (Guenot, 2022). Mais d’autres segments populaires, notamment ruraux, ont-ils été moins confrontés au contrôle social ? Est-ce que la crise Covid a été vécue de manière différenciée sur le territoire ? Si les « premier.e.s de corvées » ont fait l’objet d’une attention médiatique, et que l’expérience des soignant.e.s est bien documentée (Gelly, Spire, 2021), qu’en est-il des travailleuses du care, des livreurs à domicile, des métiers du transport ou encore des employé(e)s des services ? Quels effets a produit la distinction étatique entre secteurs « essentiels » et « non essentiels » sur des fractions de classe pourtant proches – salariés, mais aussi indépendants – et sur leurs expériences de la crise ? In fine, ces vécus de la crise modifient-ils les rapports, déjà distants, des classes populaires à l’État ? Le RT accueillera aussi des communications portant sur la réception des politiques sanitaires. Les mesures sanitaires, les gestes barrières ou le rapport à la vaccination ont-ils favorisé des solidarités ou, au contraire, renforcé la « conscience triangulaire » (Schwartz, 2011) ? Et dans ce cas, entre quelles fractions des groupes populaires ? Les mobilisations « anti-pass » ont-elles trouvé un écho parmi les groupes subalternes ? Les discours préventifs ont-ils rencontré des aspirations à la « respectabilité » et au « capital d’autochtonie » (Retière, 2003) ? Quels effets produisent les politiques sanitaires sur la diffusion d’une « bonne volonté sanitaire » (Arborio et Lechien, 2019) et sur la division genrée du travail de soin ? Comment la « préoccupation scolaire » des parents de classes populaires (Poullaouec, 2019) a-t-elle été bousculée par une « continuité pédagogique » venant redéfinir les rôles respectifs des parents (et plus spécifiquement des mères) et des enseignants dans le suivi et l’encadrement du travail scolaire ? Autant de nouvelles fractures, liées au contexte sanitaire, que les méthodes ethnographiques et localisées peuvent aider à comprendre.   Envoi des propositions et des communications Les propositions de communication devront, autant que possible, contribuer à l’articulation entre débats théoriques et enquêtes empiriques. Elles devront également expliciter les enjeux de méthodes qu’elles mobilisent prioritairement (ethnographie, analyses statistiques, articulation quantitatif/qualitatif, approches socio-historiques, etc.). Les propositions doivent mentionner les éléments suivants :
  • Nom et prénom du/des auteur-e-s, adresse email
  • Fonction et institution(s) de rattachement
  • Titre et présentation de la communication
  • Le cas échéant, session croisée dans laquelle s’inscrit la proposition
  • La proposition de communication d'une longueur maximale d’une page
Les propositions sont à déposer sur le site avant le 30 janvier 2023, au lien suivant : https://afs-socio.fr/rt/rt5/ La décision du comité d'organisation sera communiquée aux auteurs avant la mi-mars.   Un texte de présentation des communications acceptées, de 5 à 10 pages, devra ensuite être envoyé avant le congrès pour permettre aux discutant-e-s de préparer les sessions.   Bibliographie Arborio Anne-Marie, Lechien Marie-Hélène, « La bonne volonté sanitaire des classes populaires. Les ménages employés et ouvriers stables face aux médecins et aux normes de santé », Sociologie, 2019/1 (Vol. 10), p. 91-110. Bajos Nathalie, et al., “When lockdown policies amplify social inequalities in COVID-19 infections: evidence from a cross-sectional population-based survey in France”, BMC Public Health 21, 705, 2021. Beaubatie Emmanuel, « Le genre pluriel. Approches et perspectives pour complexifier le modèle femme/homme en sciences sociales », Cahiers du Genre, 2021/1 (n° 70), p. 51-74. Bernard Lise, 2017, La précarité en col blanc. Une enquête sur les agents immobiliers, Paris, Presses Universitaires de France, « Le Lien social ». Bidet Jennifer, « Déplacements. Migrations et mobilités sociales en contexte transnational », Actes de la recherche en sciences sociales, 2018/5 (N° 225), p. 67-82. Boltanski Luc, « Les usages sociaux du corps », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 26ᵉ année, N. 1, 1971, p. 205-233. Bourdieu Pierre, 1979, La distinction, Paris, Minuit. Bourdieu Pierre, 1989, La Noblesse d’État, Paris, Minuit. Bréant Hugo, Chauvin Sébastien, Portilla Ana, « Les migrations internationales à l’épreuve du capital social », Actes de la recherche en sciences sociales, 2018/5 (N° 225), p. 8-13. Bruneau Yvan et al. (dir), 2018, Mondes ruraux et classes sociales, Paris, Éditions EHESS. Caron Louise, « Des parcours migratoires aux positions économiques : ce que les migrations complexes changent à l’insertion des immigrés », Revue française de sociologie, 2022/1 (Vol. 63), p. 113-148. Ducloux Thibault. « Des socialisations régressives ? L’exemple de la production carcérale du religieux », Genèses, vol. 124, no. 3, 2021, pp. 77-96. Elias Norbert, Muel-Dreyfus Francine, « Remarques sur le commérage », Actes de la recherche en sciences sociales, Vol. 60, novembre 1985, pp. 23-29 Fassin Didier (dir.), 2022, La société qui vient, Paris, Seuil. Favier Elsa, « Se forger un corps « désirable dans le pouvoir ». L’apprentissage d’une féminité dirigeante à l’ENA », Genèses, 2021/2 (n° 123), p. 49-68. Geay Kevin, « Aux marges des beaux quartiers. Membres du Racing et prostituées au Bois de Boulogne, Genèses, 2015/2 (n° 99), p. 8-27. Gelly Maud, Spire Alexis, « Soigner sans compter. Les agents de l’hôpital public face à l’épidémie de Covid-19 », Revue française des affaires sociales, 2021/4, p. 15-34. Genèses, « Passing », 2019/1 (n° 114). Gilbert Pierre, « Le Covid-19, la guerre et les quartiers populaires », Metropolitiques, 16 avril 2020. Guenot Marion, « Garder la paix en pandémie », Métropolitiques, 23 juin 2022. Guéraut Élie, Ascension et fragilisation d'une petite bourgeoisie culturelle : une enquête ethnographique dans une ville moyenne en déclin, Thèse de doctorat, Sociologie, Paris Descartes, 2018. Guéraut Élie, Jedlicki Fanny, Noûs Camille, « L’émigration étudiante des « filles du coin » : Entre émancipation sociale et réassignation spatiale », Travail, genre et sociétés, 2021/2 (n° 46), p. 135-155. Hugrée Cédric, Penissat Étienne et Spire Alexis, 2017, Les classes sociales en Europe : tableau des nouvelles inégalités sur le vieux continent, Agone, Marseille. Laferté Gilles, 2018, L’embourgeoisement agricole, Paris, Raisons d’agir. Lambert Anne, Cayouette-Remblière Joanie (dir.), 2021, L’Explosion des inégalités. Classes, genre et générations face à la crise sanitaire, Éditions de l’Aube, collection « Monde en cours ». Mariot Nicolas, Mercklé Pierre et Perdoncin Anton (dir.), 2021, Personne ne bouge. Une enquête sur le confinement du printemps 2020, Grenoble, UGA éditions. Marx Karl, (1850), La lutte des classes en France, 1848 à 1850, Paris, La dispute (rééd 1984). Mazouz Sarah, 2020, Race, Paris, Anamosa. Menoux Thibaut, Les concierges d'hôtels : investissement dans un travail de service de luxe et construction collective du prestige d'un groupe professionnel, Thèse de doctorat en Sociologie, Paris, EHESS, 2016. Neveu Érik, « Les sciences sociales doivent-elles accumuler les capitaux ? A propos de Catherine Hakim, Erotic Capital, et de quelques marcottages intempestifs de la notion de capital », Revue française de science politique, vol. 63, n° 2, 2013, p. 337-358. Poullaouec Tristan, « Regrets d'école. Le report des aspirations scolaires dans les familles populaires », Sociétés contemporaines, 2019/2 (N° 114), p. 123-150. Retière Jean-Noël, « Autour de l'autochtonie. Réflexions sur la notion de capital social populaire », Politix, 2003/3 (n° 63), p. 121-143. Rupp Jan, « Les classes populaires dans un espace social à deux dimensions », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 109, 1995, p. 93-98. Schwartz Olivier, « La pénétration de la « culture psychologique de masse » dans un groupe populaire : paroles de conducteurs de bus », Sociologie, 2011/4 (Vol. 2), p. 345-361. Sinthon Rémi, 2018, Repenser la mobilité sociale, Paris, EHESS. Serre Delphine, « Le capital culturel dans tous ses états », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 191-192, 2012, p. 4-13. Wimmer Andreas, Glick Schiller Nina, “Methodological Nationalism, the Social Sciences, and the Study of Migration: An Essay in Historical Epistemology”, International Migration Review, Vol. 37, No. 3, Transnational Migration: International Perspectives (Fall, 2003), pp. 576-610.












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